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I) Il y a la phrase suivante constituant le verset Coran 9/12, qui mentionne les "Aïmmat ul-kufr" (les "chefs de la mécréance") : "وَإِن نَّكَثُواْ أَيْمَانَهُم مِّن بَعْدِ عَهْدِهِمْ وَطَعَنُواْ فِي دِينِكُمْ فَقَاتِلُواْ أَئِمَّةَ الْكُفْرِ إِنَّهُمْ لاَ أَيْمَانَ لَهُمْ لَعَلَّهُمْ يَنتَهُونَ" (Coran 9/12) :
Ici il est dit que si les Polycultistes avec qui le Prophète avait conclu le traité de paix auprès de la Mosquée Sacrée rompaient ce traité, les musulmans devraient aller combattre ces "chefs de la mécréance".
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II) Un mot au sujet de ces أَئِمَّةُ الْكُفْرِ :
Les "Aïmmat ul-kufr" évoqués dans ce verset : "وَإِن نَّكَثُواْ أَيْمَانَهُم مِّن بَعْدِ عَهْدِهِمْ وَطَعَنُواْ فِي دِينِكُمْ فَقَاتِلُواْ أَئِمَّةَ الْكُفْرِ إِنَّهُمْ لاَ أَيْمَانَ لَهُمْ لَعَلَّهُمْ يَنتَهُونَ" (Coran 9/12) sont les preneurs de décision de la cité de La Mecque, lorsqu'ils étaient encore Polycultistes : "و{أئمة الكفر}: رؤوس المشركين وقادتهم من أهل مكة" (Tafsîr ul-Baghawî).
Ce verset, révélé parmi tout un passage entre le moment du pacte de al-Hudaybiya et celui de la conquête de La Mecque, dit que si les Mushrikûn avec qui le Prophète avait conclu le traité de paix auprès de la Mosquée Sacrée rompaient le pacte auquel ils s'étaient engagés, les musulmans devraient aller combattre ces "chefs de la mécréance" ; en fait il s'agissait de combattre tous les gens de La Mecque qui se seraient ainsi rendus coupables d'avoir rompu le pacte, mais si les chefs ont été mentionnés de façon particulière, c'est parce que ce sont eux qui prennent les décisions et entraînent les autres : "المسألة الثانية: قوله: {فقاتلوا أئمة الكفر} معناه: "قاتلوا الكفار بأسرهم*"، إلا أنه تعالى خص الأئمة والسادة منهم بالذكر، لأنهم هم الذين يحرضون الأتباع على هذه الأعمال الباطلة" (Tafsîr ur-Râzî) (* مراده: جميع الكفار الناكثين للعهد الذي عاهدتموهم عند المسجد الحرام).
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III) Or Hudhayfa, parlant à un moment postérieur au décès du Prophète, dit qu'il restait, parmi "les chefs de la mécréance" que ce verset avait désignés, 3 hommes encore vivants :
"عن زيد بن وهب، قال: كنا عند حذيفة، فقال: "ما بقي من أصحاب هذه الآية إلا ثلاثة، ولا من المنافقين إلا أربعة." فقال أعرابي: "إنكم أصحاب محمد صلى الله عليه وسلم تخبرونا، فلا ندري. فما بال هؤلاء الذين يبقرون بيوتنا ويسرقون أعلاقنا؟" قال: "أولئك الفساق! أجل، لم يبق منهم إلا أربعة؛ أحدهم شيخ كبير لو شرب الماء البارد، لما وجد برده" (al-Bukhârî, 4381).
Ici il est relaté qu'un jour, Hudhayfa dit que, sur l'ensemble des Hypocrites qui vivaient à l'époque du Prophète (que Dieu le rapproche de Lui et le salue), il ne restait plus que 4 qui étaient vivants, l'un d'eux étant si vieux qu'il ne ressentait même plus la fraîcheur de l'eau qu'il buvait ; et que, sur l'ensemble des "Aïmmat ul-kufr" évoqués au verset 9/12, il ne restait plus que 3 qui étaient encore vivants.
--- Peut-être parlait-il là de 4 Hypocrites encore vivants sur seulement les 12 Hypocrites des "Gens de la 'Aqaba" (et non pas sur la totalité des Hypocrites étant présents à l'époque du Prophète, sur lui soit la paix) ?
--- Quant aux "Aïmmat ul-kufr" évoqués dans le verset "وَإِن نَّكَثُواْ أَيْمَانَهُم مِّن بَعْدِ عَهْدِهِمْ وَطَعَنُواْ فِي دِينِكُمْ فَقَاتِلُواْ أَئِمَّةَ الْكُفْرِ إِنَّهُمْ لاَ أَيْمَانَ لَهُمْ لَعَلَّهُمْ يَنتَهُونَ" (Coran 9/12) et dont Hudhayfa dit ici que seuls 3 d'entre eux étaient encore vivants au moment où il prononçait ces mots, qui étaient-ils ?
Parmi eux il y avait Abû Suf'yân ("قوله "إلا ثلاثة" سمي منهم في رواية أبي بشر عن مجاهد أبو سفيان بن حرب" : FB), ainsi que Suhayl ibn 'Amr (Ibid.).
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Mais cela ne veut nullement dire que ces hommes étaient demeurés "chefs de la mécréance" ; au contraire, ils s'étaient entretemps repentis et étaient devenus musulmans. C'est au moment où Dieu a prononcé ces Paroles de Coran 9/6-12 qu'ils étaient chefs de la mécréance ; ils ne le sont pas restés après.
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IV) Le concept de Muwâfât :
Muwâfât signifie littéralement "venir" ("وافَى: فلانًا: فاجأه، و– القومَ: أتاهم: وَ– العامَ: حجّ، و– الموتُ أو الكتابُ فلانًا: أدركه" : Al-Mu'jam ul-wassît). Ici cela désigne ce muni de quoi - en termes de foi et actions - l'homme se présentera à Dieu après sa mort : "ما يوافي به العبدُ ربَّه" (MF 7/439). On trouve ces termes dans ce célèbre hadîth : "عن عتبان بن مالك، قال: غدا علي رسول الله صلى الله عليه وسلم، فقال رجل: "أين مالك بن الدخشن؟" فقال رجل منا: "ذلك منافق لا يحب الله ورسوله"، فقال النبي صلى الله عليه وسلم: "ألا تقولوه يقول "لا إله إلا الله"، يبتغي بذلك وجه الله؟" قال: "بلى"، قال: "فإنه لا يوافى عبد يوم القيامة به، إلا حرم الله عليه النار" (al-Bukhârî, 6539).
--- Chez les Ash'arites, le concept de Muwâfât entraîne qu'un homme qui était kâfir durant un long moment de sa vie puis devient croyant et meurt croyant sans avoir à son passif de grands péchés, Dieu était satisfait de lui même lorsqu'il était kâfir, car le Créateur savait depuis toujours que cet homme allait mourir pieux. De même, l'homme qui était pieux durant un long moment de sa vie puis apostasie et meurt kâfir, Dieu était mécontent de lui même lorsqu'il était pieux, car Il savait depuis toujours que cet homme allait mourir kâfir. Or, disent les Ash'arites, l'Être de Dieu ne saurait connaître aucun changement (حدوث).
--- Or les Atharî ainsi que d'autres courants musulmans ne sont pas d'accord avec cette façon de voir, qui est erronée. Certes, Dieu sait bien sûr tout depuis toujours ; cependant, d'un homme qui est kâfir, le Créateur est mécontent à l'instant où celui-ci est kâfir ; et c'est si, par la suite, cet homme devient pieux que Dieu devient alors satisfait de lui. Par ailleurs, d'après les Atharî, les différents passages du Coran ont été prononcés par Dieu à un moment précis, devant l'ange Gabriel, juste avant qu'ils soient transmis ("descendus") par ce dernier au prophète Muhammad (صلى الله عليه وسلم) ("وتقوم الأفعال الحادثة بذات الله تعالى، و ليست مخلوقة مع أنها حادثة").
Dès lors, si Abû Suf'yân ibn Harb, Suhayl ibn 'Amr, al-Hârith ibn Hishâm, Saf'wân ibn Umayya et 'Ik'rima ibn Abî Jahl faisaient bel et bien partie de ces "A'ïmmat ul-kufr" avant la conquête de La Mecque, par la suite tous cinq sont devenus musulmans et sont morts musulmans : on dit donc à leur sujet : "Que Dieu soit satisfait d'eux".
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Le fait est que dans des versets parlant des incroyants en général, il y est dit au sujet d'un nombre d'entre eux que, si Dieu le veut, ils apporteront foi, même si pour l'instant les Signes ne leur "parlent" pas : "وَلَوْ أَنَّنَا نَزَّلْنَا إِلَيْهِمُ الْمَلآئِكَةَ وَكَلَّمَهُمُ الْمَوْتَى وَحَشَرْنَا عَلَيْهِمْ كُلَّ شَيْءٍ قُبُلاً مَّا كَانُواْ لِيُؤْمِنُواْ إِلاَّ أَن يَشَاء اللّهُ وَلَكِنَّ أَكْثَرَهُمْ يَجْهَلُونَ" (Coran 6/111).
Ce n'est qu'au sujet de certains incroyants précis que certains versets disent que Dieu a scellé leur cœur, et ils ne croiront pas : "إِنَّ الَّذِينَ حَقَّتْ عَلَيْهِمْ كَلِمَتُ رَبِّكَ لاَ يُؤْمِنُونَ وَلَوْ جَاءتْهُمْ كُلُّ آيَةٍ حَتَّى يَرَوُاْ الْعَذَابَ الأَلِيمَ" (Coran 10/96-97). Ainsi en fut-il de Abû Lahab, dont Dieu avait dit de son vivant même : "Il brûlera très bientôt dans un Feu doté de flammes. Ainsi que sa femme, la porteuse de fagot, dans le cou de qui il y a une corde tressée" : "تَبَّتْ يَدَا أَبِي لَهَبٍ وَتَبَّ مَا أَغْنَى عَنْهُ مَالُهُ وَمَا كَسَبَ سَيَصْلَى نَارًا ذَاتَ لَهَبٍ وَامْرَأَتُهُ حَمَّالَةَ الْحَطَبِ فِي جِيدِهَا حَبْلٌ مِّن مَّسَدٍ" (Coran 111/1-5). Ainsi en fut-il également de al-Walîd ibn ul-Mughîra, dont Dieu avait dit : "سَأُصْلِيهِ سَقَرَ" (Coran 74/26).
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Lire aussi un autre article.
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V) Dès lors :
Parmi les Aïmmat ul-kufr sus-évoqués, nombre d'entre eux se repentirent de leur Kufr Akbar, parmi lesquels Abû Sufy'ân ibn Harb, Suhayl ibn 'Amr, al-Hârith ibn Hishâm, 'Ik'rima ibn Abî Jahl.
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Parlant de Mecquois alors kâfir, le verset suivant, révélé peu après le pacte de al-Hudaybiya, disait que si Dieu n'a pas ordonné aux musulmans présents avec le Prophète sur le site de al-Hudaybiya d'attaquer les Mecquois, ce fut parce que dans la cité de ces derniers se trouvaient aussi des croyants et croyantes dont les musulmans présents avec le Prophète n'avaient pas connaissance. Mais ensuite Dieu cite une sagesse supplémentaire : "afin que Dieu fasse entrer qui Il veut dans Sa Miséricorde" : "هُمُ الَّذِينَ كَفَرُوا وَصَدُّوكُمْ عَنِ الْمَسْجِدِ الْحَرَامِ وَالْهَدْيَ مَعْكُوفًا أَن يَبْلُغَ مَحِلَّهُ وَلَوْلَا رِجَالٌ مُّؤْمِنُونَ وَنِسَاء مُّؤْمِنَاتٌ لَّمْ تَعْلَمُوهُمْ أَن تَطَؤُوهُمْ فَتُصِيبَكُم مِّنْهُم مَّعَرَّةٌ بِغَيْرِ عِلْمٍ لِيُدْخِلَ اللَّهُ فِي رَحْمَتِهِ مَن يَشَاء لَوْ تَزَيَّلُوا لَعَذَّبْنَا الَّذِينَ كَفَرُوا مِنْهُمْ عَذَابًا أَلِيمًا" (Coran 48/25). Il veut dire ici : "Il n'a pas ordonné de combattre les Mecquois, à cause de la présence, parmi ces derniers, de croyants ; par ailleurs, beaucoup de polycultistes Mecquois auraient été alors tués au combat ; or Dieu Dieu veut faire entrer certains d'entre eux dans Sa Miséricorde, et ce par le fait de les guider très bientôt à la foi".
De même, cet autre verset, révélé entre le pacte de al-Hudaybiya et la conquête de La Mecque, annonçait lui aussi : "عَسَى اللَّهُ أَن يَجْعَلَ بَيْنَكُمْ وَبَيْنَ الَّذِينَ عَادَيْتُم مِّنْهُم مَّوَدَّةً وَاللَّهُ قَدِيرٌ وَاللَّهُ غَفُورٌ رَّحِيمٌ" : "Il est à espérer que Dieu suscitera de l'amour entre vous et entre ceux vis-à-vis de qui [pour Lui] vous avez [actuellement] de l'inimitié" (Coran 60/7). D'après le commentaire le plus répandu, cette affection ici annoncée concerne le moment où ces mecquois accepteront l'islam (moment où, alors, les musulmans les aimeront du même type d'affection que celle qu'ils avaient déjà pour ceux qui étaient musulmans depuis auparavant) : "عسى الله أن يجعل بينكم وبين الذين عاديتم منهم مودة}: وهذا بأن يسلم الكافر؛ وقد أسلم قوم منهم بعد فتح مكة وخالطهم المسلمون، كأبي سفيان ابن حرب والحارث بن هشام وسهيل بن عمرو وحكيم بن حزام. وقيل: "المودة": تزويج النبي صلى الله عليه وسلم أم حبيبة بنت أبي سفيان، فلانت عند ذلك عريكة أبي سفيان، واسترخت شكيمته في العداوة. قال ابن عباس: كانت المودة بعد الفتح*: تزويج النبي صلى الله عليه وسلم أم حبيبة بنت أبي سفيان - وكانت تحت عبيدالله بن جحش، وكانت هي وزوجها من مهاجرة الحبش" (Tafsîr ul-Qurtubî) (* أي فتح الحديبية).
Wallâhu A'lam (Dieu sait mieux).