La règle première est l'autorisation de l'action temporelle (ibâhat ul-fi'l) et la licité de l'objet (hillat ul-'ayn) sur lequel cette action est susceptible de s'exercer.
Cela est cependant vrai en tant que principe très général seulement.
Car, ensuite, à un échelon plus approfondi, il existe à ce principe des nuances. Ainsi, en matière de relations sexuelles, ce n'est pas tout objet, 'ayn (même objet matériel) qui serait licite. Non, en terme d'objet, la règle première est l'interdiction.
C'est ce que nous allons voir ci-après...
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I) Ont été qualifiés de "halâl" et de "harâm" dans le Coran et la Sunna : des êtres/objets (عَيْن), mais aussi : des actions humaines (فِعل, plur. "أفعال") :
Ibn Taymiyya a évoqué cette double qualification (cf. Majmû' ul-fatâwâ 20/358 ; 29/151).
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– A) Des animaux, des éléments d'origine animale, des objets, et même des êtres humains (en un mot : des "عَيْن") sont qualifiés de "halâl" ou de "harâm" (les "'Ayn" sont désignés ci-après par la lettre "A") :
Dieu dit dans le Coran : "حُرِّمَتْ عَلَيْكُمُ الْمَيْتَةُ وَالْدَّمُ وَلَحْمُ الْخِنْزِيرِ وَمَا أُهِلَّ لِغَيْرِ اللّهِ بِهِ وَالْمُنْخَنِقَةُ وَالْمَوْقُوذَةُ وَالْمُتَرَدِّيَةُ وَالنَّطِيحَةُ وَمَا أَكَلَ السَّبُعُ إِلاَّ مَا ذَكَّيْتُمْ وَمَا ذُبِحَ عَلَى النُّصُبِ وَأَن تَسْتَقْسِمُواْ بِالأَزْلاَمِ ذَلِكُمْ فِسْقٌ" : "Ont été rendus harâm pour vous : la bête morte, le sang, la chair de porc, ce qui a été consacré à autre que Dieu, la bête étouffée, …" (Coran 5/3).
Dieu dit aussi : "حُرِّمَتْ عَلَيْكُمْ أُمَّهَاتُكُمْ وَبَنَاتُكُمْ وَأَخَوَاتُكُمْ وَعَمَّاتُكُمْ وَخَالاَتُكُمْ وَبَنَاتُ الأَخِ وَبَنَاتُ الأُخْتِ وَأُمَّهَاتُكُمُ اللاَّتِي أَرْضَعْنَكُمْ وَأَخَوَاتُكُم مِّنَ الرَّضَاعَةِ وَأُمَّهَاتُ نِسَآئِكُمْ وَرَبَائِبُكُمُ اللاَّتِي فِي حُجُورِكُم مِّن نِّسَآئِكُمُ اللاَّتِي دَخَلْتُم بِهِنَّ فَإِن لَّمْ تَكُونُواْ دَخَلْتُم بِهِنَّ فَلاَ جُنَاحَ عَلَيْكُمْ وَحَلاَئِلُ أَبْنَائِكُمُ الَّذِينَ مِنْ أَصْلاَبِكُمْ وَأَن تَجْمَعُواْ بَيْنَ الأُخْتَيْنِ إَلاَّ مَا قَدْ سَلَفَ" : "Ont été rendus harâm pour vous : vos mères, vos filles, vos sœurs, ..." (Coran 4/23-24).
Le Prophète (sur lui soit la paix) a dit : "عن أبي موسى قال: قال رسول الله صلى الله عليه وسلم: "الحرير والذهب حرام على ذكور أمتي، وحل لإناثهم"" : "La soie et l'or sont harâm pour les hommes de ma Umma, et hill [= halâl] pour ses femmes" (at-Tirmidhî 1720, Ahmad 19515, les termes ici cités sont ceux de Ahmad ; voir aussi Ibn Mâja 3595).
Dieu dit : "يَسْأَلُونَكَ مَاذَا أُحِلَّ لَهُمْ قُلْ أُحِلَّ لَكُمُ الطَّيِّبَاتُ" : "Ils te questionnent au sujet de ce qui a été rendu halâl pour eux. Dis(-leur) : "Les tayyibât ont été rendues halâl pour vous"" (Coran 5/4).
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– B) Des actions humaines (فِعل, plur. "أفعال") sont qualifiées de "halâl" ou de "harâm" (les actions sont désignées ci-après par la lettre "B") :
Dieu dit au Prophète : "قُلْ تَعَالَوْاْ أَتْلُ مَا حَرَّمَ رَبُّكُمْ عَلَيْكُمْ أَلاَّ تُشْرِكُواْ بِهِ شَيْئًا وَبِالْوَالِدَيْنِ إِحْسَانًا وَلاَ تَقْتُلُواْ أَوْلاَدَكُم مِّنْ إمْلاَقٍ نَّحْنُ نَرْزُقُكُمْ وَإِيَّاهُمْ وَلاَ تَقْرَبُواْ الْفَوَاحِشَ مَا ظَهَرَ مِنْهَا وَمَا بَطَنَ وَلاَ تَقْتُلُواْ النَّفْسَ الَّتِي حَرَّمَ اللّهُ إِلاَّ بِالْحَقِّ ذَلِكُمْ وَصَّاكُمْ بِهِ لَعَلَّكُمْ تَعْقِلُونَ" : "Dis : "Venez, que je vous récite ce que votre Seigneur a rendu harâm pour vous : que vous associez quelque chose à Lui ; que vous (ne) soyez (pas) bienfaisants envers les parents ; que vous tuiez vos enfants par crainte de pauvreté ; ... " (Coran 6/151).
Dieu a dit : "ذَلِكَ بِأَنَّهُمْ قَالُواْ إِنَّمَا الْبَيْعُ مِثْلُ الرِّبَا وَأَحَلَّ اللّهُ الْبَيْعَ وَحَرَّمَ الرِّبَا" : "alors que Dieu a rendu halâl : la vente, et a rendu harâm : l'intérêt" (Coran 2/275).
Dieu dit : "الزَّانِي لَا يَنكِحُ إلَّا زَانِيَةً أَوْ مُشْرِكَةً وَالزَّانِيَةُ لَا يَنكِحُهَا إِلَّا زَانٍ أَوْ مُشْرِكٌ وَحُرِّمَ ذَلِكَ عَلَى الْمُؤْمِنِينَ" : "L'homme qui s'adonne à la fornication ne se marie qu'avec une femme qui s'adonne à la fornication ou avec une polythéiste. Et la femme qui s'adonne à la fornication ne se marie qu'avec un homme qui s'adonne à la fornication ou avec un polythéiste. Cela a été déclaré harâm pour les croyants" (Coran 24/3). Que représente ici le pronom "cela", qui "a été interdit pour les croyants" ? Il y a deux avis sur le sujet :
– soit la fornication ;
– soit le fait de se marier avec une personne qui s'adonne à la fornication ou qui est polythéiste.
Le Prophète a dit : "عن المغيرة بن شعبة، قال: قال النبي صلى الله عليه وسلم: "إن الله حرم عليكم: عقوق الأمهات، ووأد البنات، ومنع وهات، وكره لكم قيل وقال، وكثرة السؤال، وإضاعة المال" : "Dieu a rendu harâm pour vous : de désobéir aux mères, d'enterrer les filles vivantes, et de refuser (de donner à autrui) mais de dire "Donne !" (...)" (al-Bukhârî 2277, Muslim 593).
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II) En fait, quand un texte dit qu'un être/objet (عَيْن) (A) est "halâl" ou au contraire qu'il est "harâm", cela signifie la possibilité, ou au contraire l'impossibilité, de faire telle action humaine précise (فِعل) ("B") vis-à-vis de lui :
Ainsi, quand Dieu dit : "Ont été rendus harâm pour vous : la bête morte (…)" (Coran 5/3), cela signifie que :
- cette chair ou graisse de cette bête qui est morte sans avoir été abattue de la façon voulue, il est interdit de la consommer ;
- et cette même graisse, en enduire la coque externe des bateaux, ou d'utiliser sa graisse comme combustible dans des lampes à huile, cela est également interdit d'après l'école hanafite, alors que cela demeure possible d'après l'école shafi'ite (cliquez ici pour en savoir plus).
Pareillement, quand le Prophète (sur lui soit la paix) a dit : "La soie et l'or sont harâm pour les hommes de ma Umma", cela signifie que :
- l'action de porter de la soie est harâm pour eux (celle de s'asseoir sur de la soie est aussi harâm pour les hommes d'après de nombreux ulémas) ;
- par contre, vendre de la soie et la toucher alors restent des actions autorisées.
De même, quand le Prophète a dit que l'or a été rendu halâl pour les femmes, cela signifie que :
- c'est l'action de porter de l'or sous la forme de bijoux qui est halâl pour elle ;
- par contre, utiliser des ustensiles en or a été rendu harâm autant pour les femmes que pour les hommes.
Quand la mère, la fille, la sœur, la femme mariée à autrui, etc. sont dites "harâm" pour l'homme (Coran 4/23-24), cela signifie que :
- l'action humaine de se marier avec l'une de ces femmes a été rendue harâm pour l'homme.
Similairement, quand son épouse Ummu Habîba lui proposa de se marier avec sa sœur aussi, le Prophète lui répondit : "Elle n'est pas halal pour moi" (al-Bukhârî, 4817), il s'agit de l'idée qu'elle n'est pas halal pour lui par rapport à l'action de l'épouser. Dans une autre version du même hadîth on lit d'ailleurs : "Cela n'est pas halal pour moi" (al-Bukhârî, 4813 ; ce hadîth a été rapporté par Muslim aussi, entre autres) : "Le mariage avec elle n'est pas halal pour moi".
On voit ainsi que chaque fois qu'un texte dit qu'un être/objet (عَيْن) est "halâl" ou "harâm", il faut rechercher quelle est l'action (فِعل) précise qu'il est "halâl" ou "harâm" de faire vis-à-vis de cet être/objet (et ce, soit pour tous les humains en général, soit seulement pour une catégorie d'humains en particulier : voir ci-après : A.B.b).
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Ci-après nous verrons la classification des êtres/objets (عَيْن) qui ont été qualifiés de "harâm" :
– par rapport à la détermination des actions qu'il est "harâm" de faire vis-à-vis de ces êtres / objets.
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III) Classification des êtres/objets "harâm" (العيْن الحرام) (A) par rapport à : la détermination des actions (فِعل) (B) qu'il est "harâm" de faire vis-à-vis de ces êtres/objets (A) :
Selon ce rapport, il y a 2 types d'êtres/objets "harâm" :
- les êtres/objets vis-à-vis desquels toute action est "harâm" ;
- les êtres/objets vis-à-vis desquels seule telle action précise est "harâm", d'autres actions d'utilisation demeurant "halâl" vis-à-vis de lui.
– A.A) Cet être/objet est tel que c'est toute action d'utilisation qui est harâm pour l'homme : cet être/objet est alors dit : "harâm ul-'ayn" (حرام العين) :
Cet être/objet est donc haram par rapport à toute action humaine se rapportant à son "utilisation" – et ce, quel que ce soit le musulman qui fait cette action. On dit que cet être/objet est "حرام العين" ("harâm ul-'ayn") ("complètement harâm", "harâm de son être même", c'est-à-dire : "harâm à toute action humaine d'utilisation").
C'est le cas du porc : il est non seulement harâm à la consommation, mais aussi à la vente, à l'élevage, etc. En terre musulmane, on accorde cependant aux non-musulmans qui le considèrent autorisé la liberté de l'élever et d'en manger, du moment que ce faisant ils respectent l'ordre public (cliquez ici).
C'est aussi le cas de l'alcool.
Seule la transformation de la chose "harâm ul-'ayn" en une tout autre chose (c'est-à-dire "une transformation complète") entraîne que le musulman peut entreprendre certaines actions vis-à-vis du produit définitif.
Maintenant l'action de chercher à transformer complètement cette chose "harâm ul-'ayn" en un produit définitif halâl, cette action est-elle elle-même halâl ? ou bien ne peut-on rien entreprendre à cet effet, la transformation devant se faire d'elle-même pour que le produit définitif soit réellement halâl ?
- Cliquez ici pour découvrir cela sous forme de principe général.
- Et cliquez ici pour le découvrir au travers du cas précis de la transformation du vin en vinaigre.
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– A.B) Cet être/objet (عَيْن) est tel que c'est seulement une action (فِعل) précise de l'homme qui est harâm par rapport à lui, cependant qu'une autre action (فِعل) donnée reste halâl par rapport à lui :
Le chat :
- harâm à manger ;
- halâl à élever / adopter.
L'animal (autre que le porc) "mayta" (c'est-à-dire "mort sans avoir été abattu d'après les règles voulues") :
- harâm d'en manger ou de s'en enduire le corps ;
- halâl d'en enduire des choses externes (d'après l'école shafi'ite).
Par contre, d'après l'école hanafite, un tel animal relève du cas B.A (que nous avons vu plus haut), car étant "harâm ul-'ayn".
La soie pour les hommes :
- harâm d'en porter ;
- halâl d'en vendre et d'en toucher alors.
Une femme qui est sa nièce (la fille de son propre frère ou de sa propre sœur) (ou toute autre femme par rapport à qui on est dhû rahim mahram) :
- harâm de se marier avec elle ;
- halâl de la fréquenter et de se retrouver seul avec elle dans une pièce (sauf cas exceptionnel d'attirance malsaine qu'un homme pourrait ressentir en lui).
Une femme polythéiste :
- harâm de se marier avec elle tant qu'elle demeure polythéiste ;
- halâl de lui parler (dans le respect des règles islamiques).
La femme avec qui on est dûment marié :
- halâl d'avoir des relations intimes avec elle (en respectant les autres règles islamiques : cliquez ici et ici) ;
- harâm de la maltraiter, de la blesser, de la tuer (l'époux est le chef de la famille, mais son épouse n'est pas "sa chose", qu'il pourrait humilier, maltraiter, blesser, voire tuer) ; c'est bien en ce sens que le Prophète, lors du pèlerinage d'Adieu, a, après avoir recommandé le bien à l'égard des épouses, dit à leur propos : "Vous ne possédez par rapport à elles aucun (droit), si ce n'est cela" (at-Tirmidhî, 1163, Riyâdh us-sâlihîn, 274).
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–-- A.B.b) Et même cette action (فِعل) précise qu'il est harâm (ou au contraire halâl) de faire vis-à-vis de cet être/objet (عَيْن), c'est seulement pour une catégorie précise d'humains qu'elle est harâm (ou au contraire halâl) :
La soie :
- halâl à porter : pour les femmes ;
- harâm à porter : pour les hommes.
Les aumônes :
- halâl à prendre : pour ceux qui sont dans le besoin ;
- harâm à prendre : pour ceux qui ne sont pas dans le besoin, ou qui ont les possibilités de travailler et ne le font pas par paresse ;
- systématiquement harâm à prendre : pour le Prophète et sa famille.
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Nous avions exposé, dans un autre article, une autre classification : "harâm li sifatin fîhi" / "harâm li ghayrihî". Ces deux autres catégories-là traversent les 2 catégories que nous venons de voir ici :
--- le "harâm ul-'ayn" (A.A, ici évoqué) est systématiquement : "harâm fî nafsihî" (le A.1 là-bas évoqué) ;
--- par contre, pour ce qui est de l'autre type (A.B, ici évoqué) :
----- il peut quant à lui être : "harâm fî nafsihî" par rapport à l'action donnée (le A.1 là-bas évoqué),
----- comme il peut être : "harâm li ghayrihî" (le A.2 là-bas évoqué).
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IV) En ce qui concerne les êtres/objets (عَيْن), la règle première est-elle la licéité (الحِلّة) ? (Cela tout comme en ce qui concerne les actions temporelles (أفْعال العادات) la règle première est le caractère autorisé (الإباحة) : nous l'avons vu dans un autre article) ?
En fait :
– d'abord il faut déterminer l'action temporelle (فعل من العادات) qu'il est question de faire vis-à-vis de cet être/objet (عَيْن) ;
– ensuite, c'est par rapport à cette action précise (فعل) qu'il s'agit de faire vis-à-vis de lui que l'on peut déterminer si la règle première au sujet de cet être/objet (عَيْن) est la licéité ou au contraire l'illicéité...
Voyons ci-après ces deux dimensions...
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– Les actions humaines d'ordre temporel (أفْعال العادات) sont de 2 grands types : les actions qui en soi sont mal ; et les actions qui en soi sont bien :
–--- B.A) L'action humaine temporelle (فعل من أفْعال العادات) qui est en soi une mauvaise chose (الفعل سَيّء في نفسه). Le principe général à son sujet est donc l'interdiction (فالفعل في الأصل حرام). Seuls des cas spécifiques entraînent une exception, rendant cette action humaine "autorisée", voire "recommandée" ou même "obligatoire" (يصير الفعل حَسَنًا لعارض، في حالة مخصوصة) :
Le fait pour un humain de tuer, cela est une mauvaise chose en soi ("qabîh fî dhâtihî") : Ibn 'Abd is-Salâm l'a écrit en toutes lettres. Seuls des cas spécifiques [li 'âridh] font qu'il devient autorisé (jâ'ïz) de le faire.
Ainsi, tuer un être humain est chose grave. Seul un cas de légitime défense fait qu'il devient autorisé à un humain de tuer l'humain agresseur, et ce parce que celui-ci s'apprêtait à le tuer et l'aurait fait s'il n'avait pas bougé. D'autres cas, également spécifiques, font qu'il devient même obligatoire de le faire : ainsi, l'armée qui envahit la Dâr ul-islâm, il devient obligatoire pour ceux qui sont envahis de la combattre. (Cf. Qawâ'ïd ul-ahkâm fî islâh il-anâm, 'Izz ud-dîn ibn 'Abd is-Salâm, 2/188, 2/199 ; voir également 1/145, 1/157).
Ibn Taymiyya a lui aussi écrit : "Le principe originel ("al-asl") est que la vie de l'humain est protégée : celui-ci ne peut être tué que pour une raison juste" : "فإن الأصل أن دم الآدمي معصوم لا يقتل إلا بالحق" (As-Sârim, p. 104).
Ceci ne fait en fait que reprendre ce que Dieu a ainsi exposé (la traduction qui suit est l'une des traductions possibles de cette phrase) : "Et ne tuez pas la personne humaine, que Dieu a rendue sacrée, sauf pour la raison juste (al-haqq)" : "وَلَا تَقْتُلُوا النَّفْسَ الَّتِي حَرَّمَ اللَّهُ إِلَّا بِالْحَقِّ" (Coran 6/151 ; Coran 17/33 ; voir aussi 25/68).
Sâlim ibn Abdillâh reprochait aux gens d'Irak qu'ils s'entretuaient, accordant trop peu d'importance au fait d'ôter une vie, alors même que, bien que Moïse (sur lui soit la paix) avait tué par erreur un homme un groupe de Pharaon, Dieu lui dit à ce sujet ce qu'Il lui dit : "عن سالم بن عبد الله بن عمر قال: "يا أهل العراق ما أسألكم عن الصغيرة، وأركبكم للكبيرة!" سمعت أبي عبد الله بن عمر يقول: سمعت رسول الله صلى الله عليه وسلم يقول: "إن الفتنة تجيء من هاهنا" وأومأ بيده نحو المشرق "من حيث يطلع قرنا الشيطان." وأنتم يضرب بعضكم رقاب بعض؛ وإنما قتل موسى الذي قتل من آل فرعون خطأ، فقال الله عز وجل له: {وقتلت نفسا فنجيناك من الغم وفتناك فتونا}" (Muslim, 2905). "عن ابن عمر: سمعت رسول الله صلى الله عليه وسلم يقول: "انما قتل موسي الذي قتل من آل فرعون خطأ، يقول الله: {وقتلت نفسا فنجيناك من الغم" (Tafsîr Ibn Abî Hâtim).
Les punitions physiques sont eux aussi une mauvaise chose en soi : Ibn 'Abd is-Salâm l'a également écrit. Et cela ne devient légitime que par rapport à des cas spécifiques, à cause de la nécessité (Qawâ'ïd ul-ahkâm fî islâh il-anâm, 2/203, 1/156, 163).
Ibn Taymiyya l'a également écrit : "وكذلك سائر العقوبات المأمور بها فإنما أمر بها مع أنها في الأصل سيئة وفيها ضرر لدفع ما هو أعظم ضررا منها" (Majmû' ul-fatâwâ 20/52).
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–--- B.B) L'action humaine temporelle (فعل من أفْعال العادات) qui est en soi une chose bien (الفعل حَسَن في نفسه). Cependant, ensuite, soit cette action demeure "bien" (يبقى الفعل حسنًا ), soit cette action devient "mal" (يصير الفعل سَيّءً، لعارض), et ce selon l'être/l'objet (عين) par rapport auquel l'homme la fait (parce qu'il lui est harâm de faire cette action par rapport à cet être/objet) ; ou selon la situation dans laquelle il se trouve :
Manger et boire : cela est un bien en soi ; mais :
- cela reste un bien si cela est fait vis-à-vis d'aliments et de boissons qui sont en soi tayyib ;
- cela devient un mal si cela est fait vis-à-vis d'aliments et de boissons qui sont mauvais (khabîth), tels que la chair ou toute autre partie du porc (A.A), une partie de la bête morte (mayta) (A.A), l'alcool (A.A), la chair des animaux tels que l'âne (A.B), le chat (A.B), etc.
Par ailleurs :
- cela reste un bien si on a obtenu ces nourriture et boissons en soi tayyib par une voie licite ;
- cela devient un mal si on les a obtenus par le vol ou par une transaction illicite.
Par ailleurs :
- cela reste un bien si la consommation des aliments qui sont en soi tayyib est faite avec modération et raison ;
- cela devient un mal si cela est fait avec de l'excès (gaspillage, etc.).
Se vêtir : cela est un bien en soi ; mais :
- cela reste un bien si cela est fait avec des vêtements tayyib ;
- cela devient un mal si cela est fait avec des vêtements khabîth, comme l'est la soie pour l'homme, ou comme l'est pour le musulman un élément vestimentaire qui est symbole de kufr akbar (cliquez ici).
Avoir des relations sexuelles : cela est un bien en soi ; mais :
- cela demeure un bien si cela est fait entre un homme et une femme mariés ;
- cela devient un mal si cela est fait entre deux personnes qui ne sont pas mariés.
Par ailleurs :
- cela demeure un bien si cela est fait par voie vaginale entre un homme et une femme ;
- cela devient un mal si cela est fait par voie anale, que ce soit avec une femme ou un homme.
Par ailleurs :
- cela est un bien si cela est fait hors période de règles ;
- cela devient un mal si cela est fait pendant les règles.
Par ailleurs encore :
- cela devient un mal si on se trouve en état de jeûne (siyâm), de retraite spirituelle (i'tikâf) ou de sacralisation (ihrâm).
Travailler pour gagner de l'argent : cela est un bien en soi ; mais :
- cela est demeure bien si le travail consiste en quelque chose de tayyib ;
- cela devient un mal si la marchandise ou le service que l'on vend est khabîth.
Parler : cela est un bien en soi ; mais :
- cela est demeure bien si les paroles que l'on prononce sont du khayr ;
- cela devient un mal si les paroles que l'on prononce sont du sharr.
Par ailleurs :
- cela devient un mal si les paroles que l'on prononce sont d'ordre de la discussion humaine (min jinsi mukhâtabat in-nâss) alors qu'on se trouve en prière (salât) ; ou si elles sont d'ordre temporel (dunyawî) alors qu'on se trouve à l'intérieur de la mosquée.
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– Par rapport à ces deux types d'actions temporelles ("B.A" et "B.B"), voici différents types d'êtres/objets (عَيْن) (A) :
–--- Par rapport à l'action de mettre fin à leur vie (B.A), la règle première quant aux êtres/objets (A) :
------ les personnes humaines : la règle première à leur sujet est l'illicéité, c'est-à-dire : leur caractère sacré (الأصل في الدماء: الحرمة) ;
------ les animaux : la règle première à leur sujet est également l'illicéité. Cependant, les cas rendant exceptionnellement autorisé de les tuer présentent plus de souplesse qu'en ce qui concerne le fait de tuer un humain. Ainsi, les animaux nuisibles peuvent être tués lorsqu'ils nous nuisent réellement (animaux dangereux venus attaquer, ou même moustiques avant qu'ils ne prolifèrent trop, etc.). De même, on peut tuer un animal parce qu'on a réellement besoin d'en consommer la chair ;
------ les plantes : la règle première à leur sujet est toujours l'illicéité. Cependant les cas rendant exceptionnellement autorisé de les arracher présentent plus de souplesse encore qu'en ce qui concerne un animal. On peut ainsi arracher une plante parce qu'on a réellement besoin d'en consommer la racine, ou les feuilles, etc. De même, on peut abattre un arbre parce qu'on a réellement besoin de bâtir une maison pour se loger et que l'arbre gêne, de par son emplacement. On peut même couper la branche d'un arbre parce qu'elle gêne réellement le passage des gens.
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–--- Par rapport aux actions temporelles autres que celle de mettre fin à leur vie (B.B), la règle première quant aux êtres/objets (A) :
------ Les personnes humaines :
-------- par rapport à l'action (B) de les regarder : la règle première à leur sujet est la licéité. La restriction concerne les cas de shahwa (donc la 'awra, qui est mazinnat ush-shahwa, et également, par rapport à ce qui n'est pas 'awra, le cas où il y a effectivement shahwa), ainsi que les cas où on mettrait mal à l'aise par un regard insistant (même sur ce qui n'est pas 'awra).
-------- par rapport à l'action d'en tirer profit sexuellement (B) : la règle première à leur sujet est l'illicéité (الأصل في الأبضاع: الحرمة). Ceci signifie que seule est licite, quant au fait de jouir sexuellement du corps de celle-ci, la personne avec qui on est dûment marié (les surriyya n'existent plus).
Avoir des relations sexuelles est en soi une chose bonne (nous l'avons vu plus haut). Cependant, toutes les personnes se trouvant sur Terre ne sont pas telles qu'on puisse avoir des relations avec n'importe qui parmi elles, suite à un simple consentement : cela est dû au caractère sacré du corps humain. C'est bien pourquoi le Prophète a désigné le mariage (qui en islam est un contrat d'un type particulier) comme étant : "ma-s'tahlaltum bihî al-furûj" (al-Bukhârî 2572, Muslim 1418) : "ce par le moyen de quoi vous avez rendu halâl (le fait de tirer profit) des parties intimes". Il a aussi dit : "ma-s'tahlalta min farjihâ" (al-Bukhârî 5006, Muslim 1493). Cette formule exprime bien que la règle première, à propos des 'ayn que sont les parties intimes de toute personne existant sur Terre est : l'illicéité.
Ensuite, une fois à l'intérieur du cadre licite d'un 'ayn par rapport à cet égard, en ce qui concerne l'action "relations sexuelles", la règle première est la permission : quelle fréquence, quelle position, quelle durée, etc., tout cela relève de la permission originelle (et il n'est donc pas besoin d'un texte pour permettre, mais d'un texte pour "interdire" ou "rendre mak'rûh"). Les interdits qui figurent dans les textes quant aux relations avec cette personne précise sont : la sodomie de façon absolue, la pénétration vaginale lors des règles, ou encore lors de circonstances interdisant cela (comme l'état d'ihrâm ou de i'tikâf).
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----- Les végétaux :
-------- par rapport à l'action de se les approprier (B) : la règle première à leur sujet est la licéité. Ne sont harâm à s'approprier que les plantes qui sont déjà la propriété de quelqu'un d'autre. Il est de même harâm d'oublier la modération et d'oublier autrui et donc de s'approprier tellement de plantes qu'il n'en resterait presque rien pour autrui.
-------- par rapport à l'action de les manger (ce qui présuppose qu'on les a déracinés) (B) : la règle première à leur sujet est la licéité. Ne sont harâm à manger que les plantes qui sont toxiques ; et celles qui sont enivrantes ou hallucinogènes.
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----- Les animaux :
-------- le genre "animal" (جنس الحيوانات), par rapport à l'action de manger la chair de ses individus (ce qui présuppose qu'ils ont été abattus dans les règles de l'art) (B) :
- la règle première à leur sujet est la licéité d'après l'école malikite : en soi, tout animal est licite quant au fait d'en manger la chair, tant qu'il n'y a pas un texte qui déclare l'animal harâm ou mak'rûh ;
- il semblerait que l'approche de l'école hanafite ne soit pas, sur ce point précis, la même (Wallâhu A'lam).
-------- l'animal précis (عين الحيوان غير المحرَّم) qui est mort et dont on nous présente la chair, par rapport à l'action de manger celle-ci (B) :
- la règle première à leur sujet est l'illicéité. Cela signifie que tant qu'on n'est pas assuré que cet animal (en soi déjà halal à la consommation) a été abattu de la façon voulue (et on en aurait l'assurance : soit parce que toute la viande disponible dans le pays est halal ; soit parce qu'on a entière confiance en celui qui nous sert cette viande après nous avoir invité chez lui), tant qu'on n'a donc pas l'assurance quant à la chair qui se trouve devant soi, on ne peut pas la consommer (et ce parce que l'état naturel des choses n'est pas que l'animal a été abattu de la façon rituelle voulue, mais au contraire qu'il est mort de lui-même, ou qu'il a été abattu autrement que par la façon rituelle ; cela demande donc à être établi).
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A lire, en complément :
Wallâhu A'lam (Dieu sait mieux).