Lorsque l'islam est arrivé dans des régions de culture autre qu'arabe, il a bien fallu que les ulémas installés dans cette région cherchent à distinguer :
--- ce qui, dans les faits et dires du Prophète (sur lui soit la paix), relève du ta'abbudî muta'ayyan (ne pouvant pas être changé par quelque chose semblant en être l'équivalent)
--- et ce qui, dans ses faits et dires, relève du ta'abbudî où il y a quelque chose lié au contexte de l'Arabie, ce quelque chose pouvant donc être délaissé pour son équivalent dans la culture locale.
En Inde, par exemple, les ulémas ont cherché à vivre les règles ta'abbudî enseignées par le Prophète tout en vivant leur culture indienne, n'ayant pas hésité à adopter les équivalents indiens des éléments qui étaient liés à l'arabité dans le modèle et les paroles du Prophète (que Dieu le bénisse et le salue). Nous allons citer quelques exemples plus bas...
Cette façon de faire des ulémas de l'Inde est éclairante pour nous, musulmans vivant dans une autre culture non-arabe, la culture européenne (et plus précisément, pour nous : la française).
Curieusement, cependant, certains musulmans indiens critiquent aujourd'hui la même démarche lorsque ce sont des musulmans installés en Europe qui veulent la faire. Cette fois ils dénoncent "un délaissement de la Sunna" et "une imitation d'une culture étrangère".
Quelques exemples simples : à écouter certains musulmans indiens :
- Pour eux il n'y a aucun mal à avoir adopté le kurta coupé sur les deux côtés, la sherwânî, le turban à l'indienne et les babouches, tous vêtements gardant un cachet indien. Par contre les musulmans européens ne doivent pas faire de même par rapport aux coutumes européennes : car sinon "ils délaissent la Sunna"...
- Eux, musulmans indiens, mangent sur des tables basses (khiwân) du genre dont Anas ibn Mâlik a dit que le Prophète (sur lui soit la paix) n'a jamais mangé sur de telles tables, mais ensuite disent aux musulmans d'Europe qu'ils doivent éviter de manger sur des tables européennes...
- Eux disent : "Chacun de vos faits et gestes doit être conforme à ce que le Prophète, sur lui soit la paix, a fait. Même s'il était vrai que dans les 'âdât on n'est pas tenu de se conformer à ce que le Prophète a fait, pourquoi donc choisir des 'âdât d'autres peuples que celles du Prophète (sur lui soit la paix) et de ses Compagnons ?", puis vous disent : "Là, désolé, je suis pressé, je dois boire mon thé au lait, comme après chaque salât ul-'asr. Et j'ai aussi l'habitude de mâcher du bétel (pân)."
- Eux écoutent des poèmes en urdu chantés sur des airs indiens, mais disent que le chant "Sarajevo", par exemple, a des airs trop européens pour être écouté...
- Eux déplorent que des musulmans arabes critiquent le fait que eux ils disent "Khudâ", mais, l'instant d'après, critiquent eux-mêmes que des musulmans européens disent "God" ou "Dieu"...
Mais bref...
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Rappel :
Ibn Taymiyya écrit : "وأيضا فالاقتداء به يكون تارة في نوع الفعل، وتارة في جنسه؛ فإنه قد يفعل الفعل لمعنى يعمُّ ذلك النوع وغيره، لا لمعنى يخصُّه؛ فيكون المشروع هو الأمر العام" (MF 22/324). Et, un peu plus loin : "وهذا النوع ليس مخصوصا بفعله وفعل أصحابه، بل وبكثير مما أمرهم به ونهاهم عنه. وهذا سمته طائفة من الناس: "تنقيح المناط"؛ وهو أن يكون الحكم قد ثبت في عين معينة وليس مخصوصا بها بل الحكم ثابت فيها وفي غيرها فيحتاج أن يعرف "مناط الحكم" (MF 22/326).
Ibn Taymiyya veut dire ici que, par rapport à l'action que le Prophète (sur lui soit la paix) a faite ta'abbudan ou a dit de faire ta'abbudan, et par rapport à laquelle il faut suivre son modèle ("التأسِّي به" / "الاقتداء به") :
- la règle originelle est de pratiquer ce que le Prophète a fait ou dit de faire, en ayant recours à la chose particulière, c'est-à-dire au moyen exact, à laquelle il a eu recours ou qu'il a mentionnée : "الاقتداء برسول الله صلى الله عليه وسلم في عين ما فعله أو ذكره" ;
- parfois, il est également possible de suivre le modèle du Prophète (sur lui soit la paix) par le recours à non pas forcément l'exacte chose qu'il a utilisée ou dit d'utiliser, mais par le recours à l'une des choses qui relèvent de l'espèce (c'est-à-dire de l'ensemble immédiat, de la catégorie immédiate) à laquelle appartient le moyen auquel le Prophète a eu recours ou qu'il a mentionné : "الاقتداء برسول الله صلى الله عليه وسلم في نوع ما فعله أو ذكره" ;
- parfois (moins souvent), à cause d'une raison particulière liée au contexte dans lequel on vit, il se peut que suivre le modèle du Prophète (sur lui soit la paix), cela se fasse par le recours à l'une des choses qui relèvent du genre (c'est-à-dire de la catégorie plus générale, laquelle est située au-dessus de la catégorie immédiate) auquel appartient le moyen auquel le Prophète a eu recours ou qu'il a mentionné (cette catégorie générale regroupant cette catégorie immédiate ainsi que d'autres catégories du même niveau) : "الاقتداء برسول الله صلى الله عليه وسلم في جنس ما فعله أو ذكره".
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I) Des exemples de cas où il est possible d'avoir recours à un "équivalent" ou "presque équivalent" du moyen qui a été énoncé dans le texte de la Sunna, celui-ci étant lié au contexte de l'Arabie :
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1) Datte pour rompre le jeûne / Autre fruit sucré pour rompre le jeûne :
- "عن أنس بن مالك قال: كان رسول الله صلى الله عليه وسلم يفطر على رطبات قبل أن يصلي، فإن لم تكن رطبات، فعلى تمرات، فإن لم تكن حسا حسوات من ماء" : "Avant d'accomplir la prière (du coucher du soleil), le Messager de Dieu (que Dieu le bénisse et le salue) rompait son jeûne avec des dattes mûres ; s'il n'y en avait pas, avec des dattes sèches ; et s'il n'y en avait pas, il buvait quelques gorgées d'eau" (at-Tirmidhî 696, Abû Dâoûd 2356).
- "وروى الطبراني في الأوسط من طريق يحيى بن أيوب عن حميد عن أنس: "كان رسول الله صلى الله عليه وسلم إذا كان صائما لم يصل حتى يأتيه برطب وماء فيأكل ويشرب، وإذا لم يكن رطب لم يصل حتى يأتيه بتمر وماء." وقال: تفرد به مسكين بن عبد الرحمن عن يحيى بن أيوب وعنه زكريا بن عمر" : "Lorsque le Messager de Dieu avait jeûné, il n'accomplissait pas la prière (de al-maghrib) jusqu'à ce que (Anas) lui apporte des dattes mûres et de l'eau, qu'il mangeait et buvait. S'il n'y avait pas de dattes mûres, il n'accomplissait pas la prière jusqu'à ce que (Anas) lui apporte des dattes sèches et de l'eau" (cité dans Nayl ul-awtâr avec le propos relaté).
Ibn Hazm, fidèle à son littéralisme, affirme qu'il est obligatoire que ce soit avec des dattes que l'on rompe son jeûne : celui qui dispose de dattes mais rompt par autre chose, celui-là fait un péché, affirme-t-il ! (Cf. Al-Muhallâ 4/455 : mas'ala n° 806.)
Sinon, Ibn Qudâma rappelle qu'il est seulement recommandé que ce soit avec des dattes que l'on rompe le jeûne (Al-Mughnî). D'ailleurs, une fois, en voyage, le Prophète (sur lui soit la paix) a, pour rompre son jeûne, demandé de l'orge concassé (sawîq) mélangé à de l'eau (al-Bukhârî).
Ash-Shawkânî écrit que la recommandation de rompre le jeûne avec une ou des dattes n'est pas lié à la datte en elle-même, mais au fait qu'elle constitue quelque chose de sucré : c'est là le principe motivant (manât, 'illa) de la recommandation faite par le Prophète (sur lui soit la paix). Dès lors, toute chose sucrée réalisera cette recommandation : "وإنما شرع الإفطار بالتمر لأنه حلو، وكل حلو يقوي البصر الذي يضعف بالصوم؛ وهذا أحسن ما قيل في المناسبة وبيان وجه الحكمة؛ وقيل: لأن الحلو يوافق الإيمان ويرق القلب. وإذا كانت العلة كونه حلوا، والحلو له ذلك التأثير، فيلحق به الحلويات كلها؛ أما ما كان أشد منه حلاوة فبفحوى الخطاب، وما كان مساويا له فبلحنه" (Nayl ul-awtâr, 4/285-286).
On peut proposer qu'il s'agirait non pas de n'importe quel sucrerie, mais d'un sucré qui est comparable à la datte : un fruit qui apporte beaucoup de sucres rapides tout en étant consistant : de la banane, par exemple (mais pas des pâtisseries).
En fait, après une journée de jeûne, ce dont le corps a besoin ce sont des sucres rapides (pour voir ses besoins en glucose être comblés rapidement) ainsi que de l'eau (pour être réhydraté). Voilà la raison d'être des hadîths suscités du bien-aimé Prophète (que Dieu le bénisse, le salue et le remercie de notre part). Cela peut être atteint par une ou quelques datte(s), ou par exemple par une banane bien mûre.
Par contre, il ne s'agit pas de manger une datte, puis d'avaler immédiatement quantité de fritures, pâtisseries et lait au sirop...
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2) Pour procéder au tahnîk du nouveau-né : datte / autre chose sucrée :
Le tahnîk consiste à mâcher une datte puis à enduire le palais du bébé d'un minuscule fragment de cette datte, de sorte que ce fragment se délite très progressivement et que le bébé goûte la douceur de la datte d'une façon qui ne cause pas du tort à sa santé.
Le Prophète a pratiqué le tahnîk de Abdullâh ibn uz-Zubayr (al-Bukhârî 3697, Muslim 2146).
Il pratiqua également le tahnîk du frère utérin de Anas ibn Mâlik, au sujet duquel, il dit, quand il vit le bébé apprécier énormément la douceur de la datte, il fit cette remarque : "حب الأنصار التمر" : "(Voyez bien là) le goût des Ansâr pour les dattes sèches !" (Muslim 2144).
Il y a aussi cette relation : "On emmenait des enfants auprès du Prophète, il prononçait sur eux des invocations de bénédiction et procédait à leur tahnîk" (Muslim 286, 2147).
Que le tahnîk ait été fait par le Prophète (sur lui soit la paix) permettait un tabarruk par sa salive (ce qui n'est pas possible par d'autres personnages) ; cependant, la pratique du tahnîk est indépendante du tabarruk : les Arabes pratiquaient systématiquement ce tahnîk, comme on le voit dans cette autre relation du tahnîk du frère de Anas : "وكرهت أن تحنكه حتى يحنكه رسول الله صلى الله عليه وسلم" (Ahmad, 12028).
A ce qu'un médecin a affirmé, cela serait un moyen systématique d'éviter la bien connue "hypoglycémie du nouveau-né". Il ne s'agit cependant pas d'avoir recours à ce procédé sans même avoir vérifié si, médicalement parlant, cela ferait du tort à son bébé, ou pas. Prudence est mère de sûreté.
En tous cas, Ibn Hajar écrit : "Le mieux pour cela est la datte sèche ; si on ne dispose pas de datte sèche, alors la datte mure ; sinon, toute chose sucrée ; le miel d'abeille est mieux qu'autre chose ; ensuite, tout ce que le feu n'a pas touché, comme c'est le cas dans son équivalent, de ce par quoi le jeûneur rompt le jeûne" (Fat'h ul-bârî, 9/728).
An-Nawawî : "اتفق العلماء على استحباب تحنيك المولود عند ولادته بتمر؛ فإن تعذر فما في معناه وقريب منه من الحلو" (Shar'h Muslim, 14/122-123).
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3) Manger avec ses doigts / avec une cuillère / des fourchettes :
Le Prophète (que Dieu le salue) mangeait en portant les aliments à sa bouche par ses doigts, et même par 3 de ses doigts : "عن كعب بن مالك قال: كان رسول الله صلى الله عليه وسلم يأكل بثلاث أصابع، ويلعق يده قبل أن يمسحها" (Muslim, 2032). Voyez l'élégance du Prophète, qui ne mangeait pas en s'empiffrant !
An-Nawawî écrit qu'il est recommandé de ne pas joindre le 4ème ni le 5ème doigts, sauf s'il s'agit de quelque chose qu'il est difficile de ne manger qu'avec 3 doigts : " في هذه الأحاديث أنواع من سنن الأكل: منها استحباب لعق اليد محافظة على بركة الطعام وتنظيفا لها؛ واستحباب الأكل بثلاث أصابع، ولايضم اليها الرابعة والخامسة إلا لعذر بأن يكون مرقا وغيره مما لايمكن بثلاث وغير ذلك من الأعذار" (Sharh Muslim).
Au lieu de manger avec ses doigts, peut-on utiliser une cuillère, ou des fourchettes, pour porter les aliments à sa bouche ?
Cela est culturel : en Inde et en Malaisie, les gens mangent en général avec leurs doigts. En Europe occidentale, les gens mangent avec une cuillère ou une fourchette. En Chine, les gens mangent avec des baguettes.
Par contre, utiliser sa main gauche pour porter les aliments ou la boisson à sa bouche, cela touche au ta'abbud et est mauvais (mak'rûh), et ce, que l'on mange ainsi avec les doigts, avec une cuillère, une fourchette, etc. Car le Prophète a défendu qu'on utilise sa main gauche pour porter à sa bouche les aliments ou la boisson : "عن ابن عمر أن رسول الله صلى الله عليه وسلم قال: لا يأكلن أحد منكم بشماله، ولا يشربن بها، فإن الشيطان يأكل بشماله، ويشرب بها" (Muslim, 2020). "عن سلمة بن الأكوع أن رجلا أكل عند رسول الله صلى الله عليه وسلم بشماله، فقال: "كل بيمينك." قال: "لا أستطيع." قال: "لا استطعت!" ما منعه إلا الكبر. قال: فما رفعها إلى فيه" : Mangeant en compagnie du Messager de Dieu, un homme utilisa pour ce faire sa main gauche. Le Prophète lui dit : "Mange de ta main droite." Il répondit : "Je ne peux pas" : ce fut par orgueil qu'il ne se conforma pas en acte à l'injonction du Prophète. Le Prophète lui dit alors : "Que tu ne puisses plus !" Il ne put ensuite plus lever sa main droite jusqu'à sa bouche (Muslim 2021). Cela est soit légèrement déconseillé, soit interdit (Mirqât ul-mafâtîh 8/162, Fat'h ul-bârî 9/647-648). La force des mots employés par le Prophète quand il a défendu de le faire semble indiquer le second de ces deux avis comme plus pertinent : cela est interdit (Zâd ul-ma'âd, 2/405) [= mak'rûh tahrîmî d'après la terminologie courante].
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4) Vêtements arabes / vêtements indiens / vêtements européens :
Pour ce qui est du turban :
- Cheikh Thânwî l'a explicitement affirmé : le port du turban relève des pures coutumes arabes. Et à un musulman indien qui lui reprocha vivement de ne pas porter de turban alors que le Prophète le faisait, Cheikh Thânwî lui répliqua : "Et vous, pourquoi ne portez-vous pas de pagne ("lunguî") ? Le Prophète en portait aussi !" (Da'wat-o-tablîgh ké ussûl-o-ahkâm, p. 327).
- Ibn ul-'Uthaymîn a lui aussi affirmé que le port du turban n'est pas une sunna ta'abbudiyya mais une sunna 'adiyya.
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Alors qu'il était calife, Omar ibn ul-Khattâb écrivit à d'autres Compagnons se trouvant en Azerbaïdjan pour leur dire d'une part de ne pas se laisser ramollir et d'autre part de garder les coutumes vestimentaires des Arabes :
"اتزروا وارتدوا وانتعلوا، وألقوا الخفاف والسراويلات، وعليكم بلباس أبيكم إسماعيل، وإياكم والتنعم وزي الأعاجم، وعليكم بالشمس فإنها حمام العرب، وتمعددوا، واخشوشنوا، واقطعوا الركب ، وانزوا نزوا، وارموا الأعراض" :
"Portez le pagne, la houppelande et les sandales ; délaissez les chaussettes en cuir et les pantalons : ayez les vêtements de votre père Ismaël. Préservez-vous du luxe et de la tenue vestimentaire des non-arabes. Restez au soleil, c'est le hammam des Arabes. Gardez la culture de Ma'add [ancêtre des Quraysh]. Endurcissez-vous. Soyez prêts. Coupez les étriers [= montez à cheval sans étriers] et sautez à cheval. Entraînez-vous au tir à l'arc en visant des cibles" (Musnadu Abî 'Awâna, voir Al-Furûssiya, Ibn ul-Qayyim, p. 120).
Cependant, cela ne concernait que des musulmans Arabes, installés en tant que conquérants dans une terre devenue musulmane mais de culture non-arabe. An-Nawawî écrit ainsi que "l'objectif de Omar était de les exhorter à rester simples et frugaux, et de préserver les traditions des Arabes en la matière" (Shar'h Muslim, 14/46-47). Omar (que Dieu l'agrée) les exhortait donc à ne pas se ramollir par le luxe, et à préserver leurs traditions arabes. D'ailleurs il parle bien de "vêtements de votre père Ismaël".
C'est bien pourquoi beaucoup de ulémas de l'Inde ne voient aucun mal à porter le kurta à l'indienne (fendu des deux côtés), le gilet (صدري), le "costume" appelé "sherwânî", et les babouches ("maudjhrî"), tous vêtements dont on ne trouve pas trace chez le Prophète (sur lui soit la paix), ni chez ses Compagnons.
Ces vêtements indiens seraient-ils alors "contraires à la Sunna" ?
Non.
Le fait est que la Sunna n'enseigne, en matière vestimentaire, que des règles ta'abbudiyya. Du moment que l'on respecte ces règles, les différentes coutumes des différents pays peuvent s'exprimer différemment. Les ulémas de l'Inde n'ont donc fait qu'appliquer ces règles ta'abbudî', et cela a donné des vêtements qui sont en même temps "indiens" et : "conformes à la Sunna ta'abbudiyya".
Les musulmans d'Europe n'ont qu'à faire de même avec les vêtements européens.
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5) Outil par lequel on se brosse les dents : branchette de Salvadora Persica, ou de Azadirachta indica ?
Le Prophète (sur lui soit la paix) a fortement recommandé le siwâk. Et il utilisait la branchette de l'Arak ou Araq (Salvadora Persica).
--- utiliser un morceau de "أراك" ("Salvadora persica"), cela relève de "suivre le modèle du Prophète (que Dieu le bénisse et le salue) en ayant recours à exactement le moyen exact (عين) que celui qu'il a utilisé et mentionné" ;
--- utiliser une branchette d'un autre arbre (pourvu qu'il ne fasse de tort ni aux dents ni aux gencives ni à la santé), cela relève de "suivre le modèle du Prophète (que Dieu le bénisse et le salue) en ayant recours à un moyen qui appartient à la même espèce (نوع) [= la même catégorie immédiate] que celle à laquelle appartient le moyen qu'il a utilisé et mentionné". J'ai vu cela en Inde, au Gujarat, où c'étaient des branchettes d'un autre arbre que de nombreux musulmans (y compris Cheikh Ab'râr Ahmad, l'un de mes professeurs) utilisaient quotidiennement : le "margousier" (Azadirachta indica) (appelé : "neem" en urdu / hindi / gujarati).
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6) Remèdes pour se soigner de telle et telle maladies :
Le Prophète (sur lui soit la paix) a enseigné de se soigner par rapport aux maladies. Cela est une règle ta'abbudî, universelle. Et c'est une règle générale.
Par contre, pour soigner certaines affections précises, le Prophète a aussi enseigné d'avoir recours à tel remède particulier. Il a dit ainsi en substance : "Ayez recours au "qust bahrî"...". Dans les ouvrages de la Sunna on trouve mention : du miel ; du qust hindî ; du lait et de l'urine de chamelle ; de la ventousothérapie ; etc.
Se soigner d'une maladie aujourd'hui, ce n'est pas forcément avoir recours à cette substance même : on peut également avoir recours aux moyens médicinaux du pays où nous vivons. C'est ce que Shâh Waliyyullâh a ainsi exprimé : "والأصل فيما روى عن النبي صلى الله عليه وسلم من المعالجات التجربة التي كانت عند العرب" : "La règle à propos des remèdes rapportés du Prophète (sur lui la paix) est qu'il s'agissait des expériences des Arabes (d'alors)" (Hujjat ullâh il-bâligha 2/525). Il a donc classé ces remèdes comme appartenant à : "ce qui ne relève pas de la mission du Prophète" : "وثانيهما ما ليس من باب تبليغ الرسالة، وفيه قوله صلى الله عليه وسلم: "إنما أنا بشر إذا أمرتكم بشيء من دينكم فخذوا به وإذا أمرتكم بشيء من رأيي، فإنما أنا بشر"، وقوله صلى الله عليه وسلم في قصة تأبير النخل: "فانى إنما ظننت ظنا، ولا تؤاخذوني بالظن، ولكن إذا حدثتكم عن الله شيئا، فخذوا به، فإني لم أكذب على الله": فمنه الطب؛" (Ibid., 1/372).
Les musulmans de l'Inde ont ainsi développé une médecine propre à leur pays, qu'ils appellent : "طبِ يوناني", où on trouve des points communs mais aussi des points de différence avec les remèdes suscités ; et il s'y trouve des choses qui ne sont pas mentionnées dans les Hadîths.
Alors : "Contraire à la Sunna", ce "Tibb-é yûnânî" ?
Non.
Cela ne signifie pas qu'il faille "jeter à la corbeille" tous les enseignements médicaux présents dans la Sunna ! Non, car d'une part certains de ces traitement sont universels. Quant aux traitements régionaux, on doit s'inspirer des enseignements de la Sunna pour trouver nous aussi des remèdes naturels de la région où nous, nous habitons, en tant que médecine alternative (pour les affections bénignes, sans pour autant nier l'allopathie et la chirurgie dans les cas nécessaires). Comme ce qu'ont fait les musulmans de l'Inde pour la région où, eux, ils habitent.
– A La Réunion, on commence ainsi à redécouvrir les bienfaits de certaines plantes. Par ailleurs, les tisanes et autres poudres de certaines rhizomes ("arrow-root", "la rouroute") reviennent au goût du jour.
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7) Nappe posée à même le sol / Table basse sur laquelle on mange :
Anas ibn Mâlik dit : "Le Prophète n'a jamais mangé sur une table basse ("khiwân")" (…). On questionna alors Anas : "Sur quoi mangeaient-ils donc ? – Sur des nappes (posées à même le sol) ("sufar")" : "عن قتادة، عن أنس بن مالك، قال: "ما أكل النبي صلى الله عليه وسلم على خوان، ولا في سكرجة، ولا خبز له مرقق." قلت لقتادة: علام يأكلون؟ قال: "على السفر" (al-Bukhârî 5099).
Pourtant, dans bien des Dâr ul-'ulûm de l'Inde, on mange en étant assis par terre, mais les plats posés devant soi sur des tables basses et rectangulaires (tout à fait comparables aux tables basses japonaises)... des tables de ce genre-là même dont Anas ibn Mâlik dit que le Prophète n'a jamais mangé sur elles. (Je ne parle pas ici de la question d'adopter alors telle disposition intérieure en choisissant ce genre de tables, mais de l'action elle-même de choisir ce genre de tables.)
"Contraire à la Sunna" ?
Non, le fait de manger sur des nappes posées à même le sol, cela est simplement la coutume arabe : celui qui le veut le pratique, et celui qui veut avoir recours à l'usage de son pays le pratique.
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8) Emploi de la langue arabe / de la langue française lors du sermon de la prière du vendredi :
Le Prophète (sur lui la paix) et ses Compagnons faisaient le sermon du vendredi (khutba) en langue arabe. Cela est certain.
Cependant, cet emploi de la langue est-il déterminé pour le sermon (comme il l'est pour la prière rituelle) ? ou bien est-ce que le principe motivant (manât, 'illa) en est que les auditeurs d'alors étaient arabophones ?
– Abû Hanîfa est d'avis qu'il est mieux de faire le sermon du vendredi en langue arabe, mais qu'il est autorisé de le faire dans une langue autre que l'arabe, même pour celui qui peut prononcer l'arabe. Cheikh Khâlid Saïfullâh démontre que, comme l'a écrit al-Haskafî, sur ce point Abû Hanîfa n'a pas délaissé son avis pour se ranger à celui de ses deux élèves (Jadîd fiqhî massâ'ïl, pp. 162-163). Il rapporte aussi que certains ulémas hanafites postérieurs ont donné sur ce point la fatwa sur l'avis de Abû Hanîfa et pas de ses deux élèves (Ibid., p. 163-164).
– L'Académie Islamique de Fiqh de la Ligue Islamique Mondiale (Rabita) a, en 1402 (1982), donné fatwa sur l'avis de Abû Hanîfa, et affirmé qu'il était autorisé de faire le sermon du vendredi dans la langue du pays, mais qu'il était mieux de dire en arabe les formules d'introduction du sermon, ainsi que les versets coraniques étant récités pendant le sermon, afin que les musulmans gardent un contact avec la langue arabe, langue des sources de l'islam.
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II) Exemples où il est mieux (et même, parfois : nécessaire, ou encore : naturel, et évident) d'avoir recours à l'équivalent plutôt qu'au moyen qui figure dans le texte de la Sunna, celui-ci étant dû au contexte de l'Arabie :
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1) Mention, dans la Sunna, de la présence de dattes sèches chez soi :
Le Prophète (sur lui soit la paix) a dit :
"عن عائشة، أن النبي صلى الله عليه وسلم، قال: لا يجوع أهل بيت عندهم التمر" : "Une maison dans laquelle il y a des dattes sèches, ses habitants n'ont pas faim" (Muslim, 2046).
"عن عائشة، قالت: قال رسول الله صلى الله عليه وسلم: بيت لا تمر فيه: جياع أهله" : "Une maison dans laquelle il n'y a (même) pas de dattes sèches est une maison dont les habitants ont faim" (at-Tirmidhî, 1815, Abû Dâoûd, 3831, Ibn Mâja, 3327).
Ici le Prophète a enseigné qu'avoir chez soi des dattes sèches, c'est un minimum pour ne pas être affamé.
Il peut s'agir aussi d'un "أمر إرشادي", d'un conseil à visée de bien-être temporel (surtout si on se fonde sur les termes de la première version suscitée de Muslim) : le Prophète aura voulu exhorter à garder des dattes sèches chez soi, afin que lorsqu'on n'a pas de quoi s'acheter à manger, on puisse se sustenter de ces dattes et on ne demeure pas affamé : "باب في ادخار التمر ونحوه من الأقوات للعيال. فيه قوله صلى الله عليه وسلم "لايجوع أهل بيت عندهم التمر"، وفي الرواية الأخرى "بيت لاتمر فيه جياع أهله". فيه فضيلة التمر وجواز الادخال للعيال والحث عليه" (Shar'h Muslim, an-Nawawî).
– Cependant, mention de la datte sèche se comprend par rapport à l'Arabie.
Car le principe (manât, 'illa) est qu'il s'agit de quelque chose que l'on peut se procurer facilement, et pour pas cher, sur le marché, et que l'on peut stocker facilement chez soi.
– Shâh Waliyyullâh de proposer donc comme équivalent en Inde : "la carotte et chose semblable" :
"قال صلى الله عليه وسلم: "لا يجوع أهل بيت عندهم تمر"، وقال عليه السلام: "بيت لا تمر فيه جياع أهله"، وقال عليه الصلاة والسلام: "نعم الادام الخل".
أقول: من تدبير المنزل أن يدخر في بيته شيئا تافها يجده رخيصا في السوق: كالتمر في المدينة، وأصول الجزر ونحوها في سواد بلادنا؛ فإن وجد طعاما يشتهيه فبها، وإلا كان الذي عنده كفافا لهم وسترا؛ فان لم يفعلوا ذلك كانوا على شرف الجوع. وكذلك حال الادام" (Hujjat ullâh il-bâligha 2/505).
– Al-Qurtubî et Ibn ul-Arabî ont proposé d'autres équivalents, pour d'autres pays , tels que le blé, ou la figue, etc. :
"قال القرطبي: ويصدق هذا على كل بلد ليس فيه إلا صنف واحد وبكون الغالب فيه صنفا واحدا فيقال على بلد ليس فيه إلا البر: بيت لا بر فيه جياع أهله؛ فكأن التمر إذ ذاك قوتهم كما تقوله أهل الأندلس: بيت لا تين فيه جياع أهله؛ وبقول أهل إيلان: بيت لا رب فيه جياع أهله.
قال ابن العربي رحمه الله تعالى: وأنا أقول ما يناسب الخلقة والشرعة وتصدقه التجربة: بيت لا زبيب فيه جياع أهله. وأهل كل قطر يقولون في قوتهم مثله" (Faydh ul-qadîr).
– A La Réunion ce sont : le manioc, les patates, le "sosso-maïs".
– A Mayotte ce sont : le manioc, les bananes vertes...
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2) Lorsqu'on cueille les fruits du Salvadora Persica, choisir ceux qui sont de couleur très foncée :
Alors que des Compagnons étaient à Marr uz-Zahrân en train de cueillir les fruits du Salvadora Persica, les "Kabâth", le Prophète (sur lui soit la paix) leur dit : "Choisissez ceux qui sont noirs, car ce sont les meilleurs". On lui demanda alors : "As-tu donc été berger d'ovins / caprins ?" Il répondit : "Oui, y a-t-il eu un prophète qui n'ait pas été berger !" :
"عن جابر بن عبد الله، قال: كنا مع رسول الله صلى الله عليه وسلم بمر الظهران نجني الكباث، فقال: "عليكم بالأسود منه فإنه أيطب" فقال: أكنت ترعى الغنم؟ قال: "نعم، وهل من نبي إلا رعاها" (al-Bukhârî, 5138, Muslim).Source : http://www.alriyadh.com.
– Cela constituait un simple conseil à visée de bien-être temporel ("أمر إرشادي"). Quant à son objet, il se comprend par rapport à l'Arabie.
– Dès lors, ce conseil du Prophète (sur lui soit la paix) en rapport avec le Kabâth d'Arabie, son équivalent à La Réunion est de dire à ses enfants, quand on part à la cueillette aux Goyaviers : "Choisissez ceux qui sont de couleur grenat : ce sont les meilleurs : ils sont à point." (Sauf bien sûr ceux qui préfèrent, aux goyaviers très mûrs, les goyaviers très acidulés.)Source : http://club.doctissimo.fr.
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3) Certains remèdes propres à l'Arabie :
Le Prophète (sur lui soit la paix) a dit : "La fièvre provient du brasier de la Géhenne. Refroidissez-la / Eteignez-la par l'eau" (al-Bukhârî 3088 etc., Muslim 2209). Certaines versions disent : "par l'eau froide" : "عن أبي هريرة، أن رسول الله صلى الله عليه وسلم، قال: "الحمى كير من كير جهنم؛ فنحّوها عنكم بالماء البارد" (Ibn Mâja 3475). Un autre hadîth dit de même : "Lorsque l'un de vous est sujet à la fièvre, qu'il s'asperge d'eau froide pendant trois nuits, à la fin de la nuit" : "عن أنس بن مالك رضي الله عنه، أن رسول الله صلى الله عليه وسلم قال: "إذا حم أحدكم، فليشن عليه الماء البارد من السحر ثلاث ليال" (al-Hâkim, 8226 : Zâd ul-ma'âd 4/29).
– Pour ce qui est de la phrase "La fièvre provient du brasier de la Géhenne", elle a été expliquée par certains ulémas comme étant une métaphore (lire mon article) (Zâd ul-ma'âd 4/28 ; Fat'h ul-bârî 10/215-216).
– Intéressons-nous ici à l'impératif d'asperger le malade d'eau, ou d'eau froide, pour combattre la fièvre : même si en apparence il est général et inconditionnel, il est en réalité sujet à restriction (takhsîs) : c'est ce que Ibn ul-Qayyim a relaté : ce sont ces fièvres du Hedjaz, qui ne sont pas dues à une maladie mais à "un coup de chaud du désert", que l'on soigne par l'eau (d'après Zâd ul-ma'âd 4/25-26).
Ibn ul-Qayyim rappelle :
"La parole du Prophète, que Dieu le bénisse et le salue, est de deux types :
- (l'un est) général pour les gens de toute la terre ;
- (l'autre est) particulier pour certains d'entre eux.
Le premier type est (constitué de) la plupart de ses paroles.
Le second est comme son propos : "Lorsque l'un de vous se rend au lieu d'aisance, ne faites pas face à la Qibla [= la direction de la Kaaba] et ne lui tournez pas le dos. Mais tournez-vous vers l'est ou vers l'ouest" [al-Bukhârî 386, Muslim 264]" : ceci ne s'adresse pas aux habitants du Machreq, du Maghreb, ni de l'Irak, mais aux habitants de Médine et à ceux qui sont face à elle [= dans la même longitude], comme Shâm etc. Il en est de même de sa parole : "Entre l'est et l'ouest se trouve la Qibla" [at-Tirmidhî 344]. Lorsque cela a été su, sa parole dans ce hadîth ["Refroidissez-la par l'eau"] est particulière pour les habitants du Hedjaz et ceux qui sont proches d'eux : la plupart des fièvres qui les atteignaient étaient du type des fièvres temporaires produites à cause de la grande chaleur du soleil : et c'est l'eau froide qui est utile face à cela : il s'agit de la boire et de se baigner" (Zâd ul-ma'âd, 4/25-26).
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4) La ventousothérapie, ou saignée par ventouse (hijâma) :
Le Prophète a dit à propos de la hijâma : "Il s'y trouve de la guérison" (Muslim 2205).
Cependant, Ibn Taymiyya dit que cela ne s'applique pas aux pays froids : y pratiquer la hijâma peut y faire du tort à la santé : dans ces pays froids, il faut avoir recours à autre chose. "ومن هذا الباب أن النبي صلى الله عليه وسلم لما احتجم وأمر بالحجامة، وقال في الحديث الصحيح: {شفاء أمتي في شرطة محجم أو شربة عسل أو كية بنار وما أحب أن أكتوي}، كان معلوما أن المقصود بالحجامة إخراج الدم الزائد الذي يضر البدن؛ فهذا هو المقصود، وخص الحجامة لأن البلاد الحارة يخرج الدم فيها إلى سطح البدن فيخرج بالحجامة، فلهذا كانت الحجامة في الحجاز ونحوه من البلاد الحارة يحصل بها مقصود استفراغ الدم؛ وأما البلاد الباردة فالدم يغور فيها إلى العروق فيحتاجون إلى قطع العروق بالفصاد وهذا أمر معروف بالحس والتجربة" (MF 17/486).
Et Ibn Taymiyya de rajouter que quand le Prophète a dit que la guérison s'y trouve, "cela était une allusion à ceux qui faisaient à ce moment-là partie de sa Umma : ils étaient au Hedjaz. (Cela) comme le fait qu'il a dit : "Entre l'est et l'ouest se trouve la Qibla" [at-Tirmidhî 344]" : "وقوله "شفاء أمتي": إشارة إلى من كان حينئذ من أمته وهم كانوا بالحجاز. كما قال: ما بين المشرق والمغرب قبلة؛ لأن هذا كان قبلة أمته حينئذ لأنهم كانوا بالمدينة وما حولها" (MF 17/486-487).
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5) L'impératif, présent dans la Sunna, de se huiler la chevelure avec l'huile d'olive. Que faire quand le musulman vit dans un pays froid et humide ?
Le Prophète (sur lui soit la paix) a dit : "عن عمر بن الخطاب قال: قال رسول الله صلى الله عليه وسلم: كلوا الزيت وادَّهِنوا به، فإنه من شجرة مباركة" : "Mangez de l'huile (d'olive) et enduisez-vous en, car elle provient d'un arbre béni (= l'olivier)" (at-Tirmidhî, 1851) : il s'agit de s'en enduire la chevelure (Faydh ul-qadîr), le corps (Mirqât ul-mafâtîh).
Dès lors :
- Faire ce que le Prophète a dit de faire, en ayant recours au moyen exact qu'il a indiqué, cela revient à se huiler la chevelure par le moyen de l'huile d'olive elle-même. Il s'agit alors de "الاقتداء برسول الله صلى الله عليه وسلم في عين ما فعله أو ذكره".
- En Inde, on voit de nombreux ulémas faire ce que le Prophète a dit de faire en employant un moyen différent de celui que le Prophète a indiqué, mais qui appartient au même ensemble que celui auquel appartient le moyen que le Prophète a, lui, utilisé. Et cet ensemble est : "l'huile". Ces ulémas s'enduisent les cheveux d'huile de noix de coco (celle-ci étant davantage disponible en Inde). Il s'agit là de "الاقتداء برسول الله صلى الله عليه وسلم في نوع ما فعله أو ذكره".
- Enfin, si on vit dans un pays humide et que c'est l'hiver, s'enduire les cheveux d'huile fait du tort à la santé ; là, suivre ce que le Prophète a dit se fera par considération pour l'objectif général pour lequel le Prophète avait dit de se huiler la chevelure : il s'agit d'ordonnancer celle-ci, de l'entretenir, d'être dans le bien-être que cela procure, etc. Atteindre cet objectif se fera alors par le recours à d'autres moyens licites que le fait de se huiler la chevelure et permettant d'atteindre l'objectif : ordonnancer sa chevelure. Il s'agit cette fois de "الاقتداء برسول الله صلى الله عليه وسلم في جنس ما فعله أو ذكره".
C'est ce que Ibn Taymiyya a ainsi formulé :
"وكذلك ادهانه صلى الله عليه وسلم: هل المقصود خصوص الدهن؟ أو المقصود ترجيل الشعر؟ فإن كان البلد رطبا وأهله يغتسلون بالماء الحار الذي يغنيهم عن الدهن، والدهن يؤذي شعورهم وجلودهم، يكون المشروع في حقهم ترجيل الشعر بما هو أصلح لهم. ومعلوم أن الثاني هو الأشبه.
وكذلك لما كان يأكل الرطب والتمر وخبز الشعير ونحو ذلك من قوت بلد فهل التأسي به أن يقصد خصوص الرطب والتمر والشعير حتى يفعل ذلك من يكون في بلاد لا ينبت فيها التمر ولا يقتاتون الشعير بل يقتاتون البر أو الرز أو غير ذلك. ومعلوم أن الثاني هو المشروع.
والدليل على ذلك أن الصحابة لما فتحوا الأمصار كان كل منهم يأكل من قوت بلده ويلبس من لباس بلده من غير أن يقصد أقوات المدينة ولباسها. ولو كان هذا الثاني هو الأفضل في حقهم لكانوا أولى باختيار الأفضل" :
"Un exemple : (…) le Prophète se huilait la chevelure :
- l'objectif est-il le fait même de se huiler la chevelure,
- ou bien est-il de bien ordonnancer ses cheveux ?
Lorsque des musulmans vivent dans un pays humide, dont les habitants se baignent à l'eau chaude, qu'ils n'ont alors plus besoin de se huiler la chevelure [pour garder celle-ci en bon état] et qu'au contraire, l'huile fait du tort à leur chevelure et à leur épiderme, ce qui sera institué les concernant sera le fait de bien ordonner leurs cheveux par le moyen qui sera le plus convenable pour eux. Il est su que c'est le second avis qui est le plus pertinent" (MF 22/325-326).
Ici on voit qu'il s'est agi non pas seulement de pouvoir avoir recours à un moyen autre que celui que le Prophète a fait ou mentionné et relevant de la catégorie supérieure, mais, de surcroît, de devoir ne pas avoir recours au moyen dûment fait ou mentionné par le Prophète, parce que ce moyen, aussi excellent soit-il de façon générale, entraîne, à cause d'une réalité extérieure certaine (li 'âridh), une mafsada plus grande.
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7) L'équipement des armées :
Le Prophète a dit : "ألا إن القوة الرمي، ألا إن القوة الرمي، ألا إن القوة الرمي" : "Ecoutez bien : la force est le tir à l'arc" (Muslim 1917, at-Tirmidhî 3073, Abû Dâoûd 2514 : ce disant, le Prophète a même commenté un verset coranique).
Ceci signifierait-il que les défenses nationales des pays musulmans devraient aujourd'hui se contenter de pratiquer le tir à l'arc, puisque le Prophète a dit que là résidait la force ?
Non, bien sûr : le Prophète a certes explicitement désigné cette discipline, mais c'est par rapport au contexte dans lequel il vivait.
On trouve quelque chose de voisin de cela in MF 17/487-488.
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8) Pouvoir tutoyer quelqu'un tout en ayant du respect pour lui / Devoir vouvoyer quelqu'un pour exprimer qu'on ne lui manque pas de respect dans la conversation :
Les Compagnons (que Dieu les agrée tous) avaient un immense respect pour le Prophète (que Dieu le bénisse et le salue). Pourtant, on les voit le tutoyer : ils lui disent systématiquement "أنْتَ". Comme par exemple dans leur célèbre question : "ولا أنت يا رسول الله؟". Cela était fait de leur part naturellement, en conformité avec la culture arabe.
Chez les musulmans de l'Inde, il est impensable que l'enfant tutoie ses parents, ou que l'élève tutoie son maître : le respect et la déférence vis-à-vis de son interlocuteur passe impérativement par le vouvoiement. Les ulémas de l'Inde exigent donc que leurs élèves les vouvoient ("آپ سے مودبانہ گزارش هے"), et le fait qu'ils les tutoient est perçu comme un grand manque de respect.
"Contraire à la Sunna" ?
Non, car, certes, la notion du respect est enseignée par la Sunna ; cependant, si certaines formes du respect et de l'irrespect sont universelles, d'autres formes dépendent de l'usage du pays ('urf). Les ulémas de l'Inde n'ont donc fait qu'appliquer le principe général à l'usage de leur pays.
Comme me l'avait dit en aparté mon professeur Mawlânâ Dhu-l-Faqâr (rahimahullâh) : "La société des Arabes de l'époque du Prophète (sur lui soit la paix) était simple. Si les usages de la société musulmane de l'Inde présentent certaines différences par rapport à ceux de la société arabe, c'est parce que l'islam est arrivé en Inde par le biais de musulmans de Perse, or la culture persane était différente de la culture arabe de l'époque" (fin de citation). Par ailleurs, la société indienne elle-même était déjà fortement hiérarchisée, avec son système de castes fondé sur la différence entre les groupes humains.
En France, tutoyer ses parents n'est pas un manque de respect. Par contre, tutoyer son professeur est une marque de familiarité, et cela dépend des personnes : il en est qui acceptent cela, d'autres pas.
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9) Mélodies arabes ou bien mélodies du pays ?
Pour la psalmodie du Coran, il ne faut avoir recours qu'aux mélodies arabes : "وعن حذيفة قال: قال رسول الله صلى الله عليه وسلم: "اقرؤوا القرآن بلحون العرب وأصواتها؛ وإياكم ولحون أهل العشق ولحون أهل الكتابين. وسيجي بعدي قوم يرجعون بالقرآن ترجع الغناء والنوح لا يجاوز حناجرهم؛ مفتونه قلوبهم وقلوب الذين يعجبهم شأنهم" : "Récitez le Coran selon les tons des Arabes et leurs voix" (al-Bayhaqî : Mishkâtul-massâbîh, 2207 : dha'îf). ("(اقرءوا القرآن بلحون العرب وأصواتها) عطف تفسيري، أي: بلا تكلف النغمات من المدات والسكنات في الحركات والسكنات بحكم الطبيعة الساذجة عن التكلفات؛ (وإياكم ولحون أهل العشق) أي: أصحاب الفسق (ولحون أهل الكتابين) أي: أرباب الكفر من اليهود والنصارى فإن من تشبه بقوم فهو منهم، قال الطيبي: اللحون جمع لحن وهو التطريب وترجيع الصوت، قال صاحب جامع الأصول: ويشبه أن يكون ما يفعله القراء في زماننا بين يدي الوعاظ من اللحون العجمية في القرآن ما نهى عنه رسول الله صلى الله عليه وسلم" : Mirqât.) Les mélodies arabes sont consignées sous les noms des Maqâmât.
Par contre, pour les chants qui demeurent autorisés, il est normal que chaque pays suive ses mélodies : cela relève de la pluralité des cultures. Les musulmans indiens ont leurs mélodies qui ne sont pas celles des musulmans arabes. Faudra-t-il s'étonner que les musulmans européens aient des mélodies différentes de celles des indiens ?
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10) Recours à la monnaie au lieu de denrées alimentaires pour s'acquitter de la zakât ul-fitr :
Pour s'acquitter de la zakât ul-fitr, le Prophète a mentionné 4 ou 5 denrées alimentaires : orge, dattes, raisins secs, aqit et (d'après certaines relations) : blé.
- Selon l'avis retenu chez ceux qui suivent Ahmad ibn Hanbal : "Il faut nécessairement que la zakât ul-fitr soit donnée par le moyen des 5 denrées alimentaires que le Prophète, sur lui soit la paix, a indiquées (sauf si aucune de ces 5 denrées n'est disponible là où l'on vit)". Il s'agit là de "الاقتداء برسول الله صلى الله عليه وسلم في عين ما ذكره".
- Mâlik dit : "Il faut que ce soit une denrée alimentaire, et il faut qu'elle soit consommée dans le lieu où l'on se trouve". Il s'agit là de "الاقتداء برسول الله صلى الله عليه وسلم في نوع ذكره".
- Abû Hanîfa, Sufyân ath-Thawrî, Omar ibn 'Abd il-'Azîz et Hassan al-Basrî disent : "Il est possible de donner au pauvre de la monnaie, et avec celle-ci il s'achètera les aliments qu'il voudra". Il s'agit cette fois de "الاقتداء برسول الله صلى الله عليه وسلم في جنس ما ذكره".
Certains ulémas hanafites affirment qu'il est autorisé que ce soit en nature ou par le moyen de la monnaie, mais mieux que ce soit en nature (en l'occurrence du blé) que l'on s'acquitte de la zakât ul-fitr, car cela correspond (de façon plus proche) à ce qui figure dans la Sunna : "قوله على المذهب المُفتَى به) مقابله ما في المضمرات، من أن دفع الحنطة أفضل في الأحوال كلها سواء كانت أيام شدة أم لا، لأنّ في هذا موافقة السنة؛ وعليه الفتوى منح؛ فقد اختلف الإفتاء ط" (Radd ul-muhtâr, 3/322).
D'autres ulémas hanafites disent qu'il est mieux de donner en numéraire qu'en nourriture (sauf en période de disette, où le mieux est de donner alors en nature) : "(ودفع القيمة) أي الدراهم (أفضل من دفع العين على المذهب) المفتى به جوهرة وبحر عن الظهيرية؛ وهذا في السعة؛ أما في الشدة فدفع العين أفضل كما لا يخفي" (Ad-Durr ul-mukhtâr, 3/321-322), ce sur quoi ash-Shâmî écrit : "لأن العلة في أفضلية القيمة كونها أعون على دفع حاجة الفقير" (Radd ul-muhtâr, 3/322).
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11) Le moyen pour établir que les deux quantités échangées sont égales : systématiquement à la mesure (comme cela se faisait à Médine à l'époque du Prophète) ? ou bien au poids (si cela s'établit au poids là où l'on vit) ?
Le Prophète (sur lui soit la paix) a déclaré que, lors du troc d'un bien contre un autre, les deux étant de la même nature, les deux marchandises échangées doivent être de même quantité (tassâwî) (de même qu'échangées en même temps). Il a dit : "De l'or contre de l'or, de l'argent contre de l'argent, du blé contre du blé, de l'orge contre de l'orge, des dattes sèches contre des dattes sèches, du sel contre du sel : quantité égale contre quantité égale, main à main. Celui qui donne un surplus ou prend un surplus tombe dans l'intérêt…" (Muslim, 1584).
Maintenant comment procéder à l'échange de ces deux marchandises : "quantité égale contre quantité égale" ? Si on échange du blé contre du blé, devra-t-on vérifier qu'il y a "même quantité" (tassâwî) selon la mesure ? ou bien selon le poids ?
En fait un autre hadîth précise que lorsqu'on échange "du blé contre du blé, de l'orge contre de l'orge, des dattes sèches contre des dattes sèches, du sel contre du sel", ce doit être : "mesure contre mesure égale" (Ahmad).
- La plupart des ulémas sont donc d'avis que même si on se trouve dans une société où ces denrées ne sont plus vendues à la mesure mais au poids, pour la question d'éviter le surplus lors du troc de ces denrées les unes contre les autres, on aura recours à la mesure, puisque c'est ce qui est mentionné dans ce hadîth ("لأن النص أقوى من العرف، والأقوى لا يترك بالأدنى" : Al-Hidâya 2/64).
- Mais un avis relaté de Abû Yûssuf est que cette formulation est due au contexte dans lequel le Prophète vivait : là où le Prophète a prononcé cette parole et quand il l'a fait, ces quatre denrées étaient vendues à la mesure, et c'est donc la mesure qui a été retenue comme critère de vérification de la similitude des quantités. Mais si on se trouve dans un contexte différent, où l'usage (al-'urf) fait que ces mêmes denrées sont vendues au poids, appliquer cette règle d'obligation de similitude des quantités demande que l'on tienne compte du contexte dans lequel on vit ; on utilisera donc la pesée comme critère de vérification de l'égalité des quantités échangées ("لأن النص على ذلك: لمكان العادة؛ فكانت هي المنظور إليها؛ وقد تبدلت" : Al-Hidâya 2/64).
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12) Qui doit payer le dédommagement (diya) en cas de homicide involontaire, ou de coups et blessures volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner ?
Le Prophète (sur lui soit la paix) a rendu comme jugement que c'étaient les parents du côté paternel ('assaba) de l'auteur de cet homicide.
Omar ibn ul-Khattâb (que Dieu l'agrée), constatant les changements sociaux qui s'étaient produits chez les Arabes depuis l'époque du Prophète (sur lui soit la paix), fit l'effort de rechercher le principe motivant ('illa) : il jugea que c'était l'entraide. Il rendit donc comme jugement que c'étaient non plus les parents mais les gens figurant dans le même registre (dîwân) que l'auteur de l'homicide.
Ibn Taymiyya écrit : "فصل: النبي صلى الله عليه وسلم قضى بالدية على العاقلة وهم: الذين ينصرون الرجل ويعينونه وكانت العاقلة على عهده هم عصبته. فلما كان في زمن عمر جعلها على أهل الديوان.ولهذا اختلف فيها الفقهاء فيقال: أصل ذلك أن العاقلة هم محدودون بالشرع أو هم من ينصره ويعينه من غير تعيين؟
فمن قال بالأول لم يعدل عن الأقارب؛ فإنهم العاقلة على عهده.
ومن قال بالثاني جعل العاقلة في كل زمان ومكان من ينصر الرجل ويعينه في ذلك الزمان والمكان. فلما كان في عهد النبي صلى الله عليه وسلم إنما ينصره ويعينه أقاربه كانوا هم العاقلة؛ إذ لم يكن على عهد النبي صلى الله عليه وسلم ديوان ولا عطاء؛ فلما وضع عمر الديوان كان معلوما أن جند كل مدينة ينصر بعضه بعضا ويعين بعضه بعضا وإن لم يكونوا أقارب؛ فكانوا هم العاقلة؛ وهذا أصح القولين؛ وأنها تختلف باختلاف الأحوال: وإلا فرجل قد سكن بالمغرب وهناك من ينصره ويعينه كيف تكون عاقلته من بالمشرق في مملكة أخرى ولعل أخباره قد انقطعت عنهم؟ والميراث يمكن حفظه للغائب؛ فإن النبي صلى الله عليه وسلم {قضى في المرأة القاتلة أن عقلها على عصبتها؛ وأن ميراثها لزوجها وبنيها} فالوارث غير العاقلة.
وكذلك تأجيلها ثلاث سنين؛ فإن النبي صلى الله عليه وسلم لم يؤجلها بل قضى بها حالة وعمر أجلها ثلاث سنين. فكثير من الفقهاء يقولون لا تكون إلا مؤجلة، كما قضى به عمر ويجعل ذلك بعضهم إجماعا. وبعضهم قال: لا تكون إلا حالة. والصحيح أن تعجيلها وتأجيلها بحسب الحال والمصلحة فإن كانوا مياسير ولا ضرر عليهم في التعجيل أخذت حالة وإن كان في ذلك مشقة جعلت مؤجلة. وهذا هو المنصوص عن أحمد: أن التأجيل ليس بواجب كما ذكر كثير من أصحابه أنه واجب موافقة لمن ذكر ذلك من أصحاب أبي حنيفة والشافعي ومالك وغيرهم؛ فإن هذا القول في غاية الضعف. وهو يشبه قول من يجعل الأمة يجوز لها نسخ شريعة نبيها؛ كما يقوله بعض الناس من أن الإجماع ينسخ؛ وهذا من أنكر الأقوال عند أحمد. فلا تترك سنة ثابتة إلا بسنة ثابتة ويمتنع انعقاد الإجماع على خلاف سنة إلا ومع الإجماع سنة معلومة نعلم أنها ناسخة للأولى" (MF 19/255-257).
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III) Un exemple relevant d'un principe différent mais voisin : il s'agit, avant d'appliquer ce que la Sunna enseigne, de vérifier que cela ne va pas entraîner une mafsada trop grande :
Face à un homme rasé de près :
Les Zoroastriens étaient connus pour se raser la barbe et se laisser la moustache. Les deux émissaires envoyés du Yémen à Médine, sur ordre de l'empereur Perse, étaient ainsi. Le Prophète (que Dieu le bénisse et le salue) les a alors interpelés sur le sujet :
"عن عبد الله بن شداد قال: كتب كسرى إلى باذام: أني نبئت أن رجلا يقول شيئا لا أدري ما هو، فأرسِلْ إليه فليقعد في بيته ولا يكن من الناس في شيء وإلا فليواعدني موعدا ألقاه به. قال: فأرسل باذام إلى رسول الله صلى الله عليه وسلم رجلين حالقي لحاهما مرسلي شواربهما. فقال رسول الله صلى الله عليه وسلم: "ما يحملكما على هذا؟" قال: فقالا له: "يأمرنا به الذي يزعمون أنه ربهم." قال: فقال رسول الله صلى الله عليه وسلم: "لكنا نخالف سنتكم: نجز هذا ونرسل هذا." قال: فمر به رجل من قريش طويل الشارب، فأمره رسول الله صلى الله عليه وسلم أن يجزهما. قال: فتركهما بضعا وعشرين يوما. ثم قال: "اذهبا إلى الذي يزعمون أنه ربكما، فأخبراه أن ربي قتل الذي يزعم أنه ربه." قالا: متى؟ قال: اليوم! قال: فذهبا إلى باذام فأخبراه الخبر. قال: فكتب إلى كسرى، فوجدوا اليوم هو الذي قتل فيه كسرى" :
"ٍ(Sur ordre de l'empereur Parwiz), Bâdhâm envoya deux hommes auprès du Prophète, que Dieu le bénisse et le salue. (Ces deux hommes) se rasaient la barbe et se laissaient les moustaches. Le Prophète, que Dieu le bénisse et le salue, leur dit : "Qu'est-ce qui vous pousse à faire ainsi ?" Ils répondirent : "Nous ordonne de faire ainsi :" celui dont ils disent qu'il est leur rabb (ils voulaient parler de l'empereur de Perse). Le Prophète leur dit alors : "Mais nous faisons différemment de votre sunna : nous taillons ceci, et laissons cela" (rapporté par Ibn Abî Shayba : sahîh ul-isnâd mursalan 'an Abdillâh ibn Shaddâd, wa huwa min kibâr it-tâbi'în).
Une autre version se lit ainsi : "ودخلا على رسول الله صلى الله عليه وسلم وقد حلقا لحاهما وأعفيا شواربهما. فكره النظر إليهما. ثم أقبل عليهما فقال: "ويلكما من أمركما بهذا؟" قالا: "أمرنا بهذا ربنا" يعنيان كسرى. فقال رسول الله: "لكن ربي قد أمرني بإعفاء لحيتي وقص شاربي" :
"Il ne voulut pas regarder ces deux hommes. Puis il se tourna vers eux et leur dit : "Hélas pour vous, qui vous a ordonné ceci ?" Ils répondirent : "Nous a ordonné ceci : notre rabb" ; ils voulaient parler de l'empereur de Perse. Le Prophète leur dit alors : "Mais mon Rabb m'a ordonné de garder la barbe et me tailler la moustache" (rapporté par at-Tabarî, la chaîne de transmission de cette version comporte cependant certains maillons qui ont fait l'objet de critiques).
Ce que le Prophète (sur lui soit la paix) a fait ici, je n'appelle nullement à l'appliquer sans compréhension du contexte, sans évaluation entre maslaha et mafsada.
Tout au contraire !
Mais justement, on voit bien là que tout un chacun sait faire preuve d'un minimum de compréhension du réel avant d'appliquer tout ce qui est relaté comme Sunna.
Wallâhu A'lam (Dieu sait mieux).