Que sont les 7 cieux que le Coran évoque ?

Dans tant de versets coraniques, Dieu dit qu'Il "a créé sept cieux". Que représente donc ce chiffre "sept" à propos des cieux ?

Dans un autre verset, Dieu a parlé de "falak" au sujet du soleil et de la lune, et également au sujet de la nuit et de la journée : "وَهُوَ الَّذِي خَلَقَ اللَّيْلَ وَالنَّهَارَ وَالشَّمْسَ وَالْقَمَرَ كُلٌّ فِي فَلَكٍ يَسْبَحُونَ" : "Et Il est Celui qui a créé la nuit et la journée, et le soleil et la lune : chacun vogue dans une falak" (Coran 21/33). "لَا الشَّمْسُ يَنبَغِي لَهَا أَن تُدْرِكَ الْقَمَرَ وَلَا اللَّيْلُ سَابِقُ النَّهَارِ وَكُلٌّ فِي فَلَكٍ يَسْبَحُونَ" : "Ni au soleil il ne conviendrait d'attraper la lune, ni la nuit pourrait dépasser la journée ; et chacun vogue dans une falak" (Coran 36/40).

La falak est à l'origine une pièce ronde du fuseau ("fî falakatin mithli falakat il-mighzal ; wa aslu dhâlika anna-l-falaka fi-l-lugha huwa : ash-shay' ul-mustadîr" : MF 6/587. En arabe, "falakah" veut dire "rondelle").

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Dans des temps anciens, c'était encore la conception géocentrique de l'univers qui prévalait, et le modèle des sphères expliquait qu'autour de la Terre étaient disposées différentes sphères concentriques, sur lesquelles étaient fixées les astres que l'on voit briller de là où nous humains sommes : la lune sur la première sphère, le soleil sur une autre, de même que différentes planètes sur différentes autres, enfin les étoiles sur la dernière. L'avis de Ptolémée était que ces sphères étaient au nombre de 9. Cependant, Ibn Taymiyya affirme que différents avis existaient chez les philosophes d'autrefois quant au nombre de ces sphères (MF 6/547-550).

Questionné au sujet de savoir si les 7 cieux sont la même chose que les (7) sphères célestes, Ibn Taymiyya répondit qu'il y avait, chez les ulémas, deux avis bien connus sur le sujet :
selon l'un, les deux sont la même chose ;
selon l'autre ce sont deux choses différentes, les 8 premières sphères célestes étant en deçà du premier ciel (MF 6/592-593, 557).

Ibn Taymiyya lui-même semble pencher vers le premier de ces deux avis, puisqu'il écrit de ce second avis qu'il "est fondé sur un raisonnement (asl) faible" (MF 6/594).
L'argument sur lequel repose le premier de ces deux avis est que si les versets suscités disent que la lune et le soleil sont "فِي فَلَكٍ" : "dans une falak", un autre verset dit : "أَلَمْ تَرَوْا كَيْفَ خَلَقَ اللَّهُ سَبْعَ سَمَاوَاتٍ طِبَاقًا وَجَعَلَ الْقَمَرَ فِيهِنَّ نُورًا وَجَعَلَ الشَّمْسَ سِرَاجًا" : Dieu "a fait de la lune une lumière se trouvant en eux" (= les sept cieux) (Coran 71/15-16) :
--- la lune se trouve dans une falak ;
--- et la lune est une lumière dans les cieux :
--- on en déduit que la falak est la même chose que le ciel (Ibn Taymiyya a cité et repris cet argument).

Ibn Hazm est lui aussi de ce premier avis : falak et samâ' constituent une seule et même chose (Al-Fissal, 1/355).

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Depuis la révolution copernicienne, on sait cependant que la conception géocentrique de l'univers est à délaisser…

(Il faut ici savoir que, bien avant Copernic, il y avait eu Aristarque de Samos, Aryabhata, Abû Ma'shar al-Balkhî, Abû Sa'îd as-Sijzî, et d'autres, qui, eux aussi, chacun à son époque, avaient avancé l'idée que les mouvements que les humains voient du soleil et des astres dans le ciel sont en fait dus au mouvement de la Terre sur elle-même. Al-Birûnî avait quant à lui présenté cette idée comme étant une autre possibilité, à côté de celle du géocentrisme.)

En tout état de cause, on sait maintenant qu'il n'existe pas de "sphères célestes sur lesquelles sont fixées les astres que nous voyons". On sait de plus que si la lune vogue réellement autour de la Terre, en revanche c'est seulement en apparence que le soleil fait quotidiennement sa course autour de la Terre de l'Est à l'Ouest. Car en réalité c'est la Terre qui tourne sur elle-même en 24 heures, d'où cet apparent mouvement du soleil autour d'elle. De plus, elle ainsi que les autres planètes formant le système solaire accomplissent une révolution autour du soleil.
On sait également que la course des planètes autour du soleil n'est pas tout à fait sphérique mais plus exactement elliptique.
On sait encore que le soleil est une étoile, comme les étoiles que nous voyons dans le ciel sont d'autres soleils très lointains.
On sait aussi que le système solaire n'est qu'une infime portion de l'univers, faisant partie d'une galaxie comportant des milliers d'autres étoiles comparables au soleil. Et cette galaxie elle-même ne constitue que l'une de nombreuses autres existant dans l'univers. On sait, enfin, que si le soleil ne vogue pas autour de la Terre, en revanche il vogue à travers la galaxie.

Si la lune et le soleil voguent donc dans une falak, il ne s'agit pas d'une "sphère céleste". La lune vogue dans une orbite autour de la Terre, et le soleil se déplace quant à lui à travers la galaxie.

La question se pose maintenant de savoir si (à l'instar de Ibn Taymiyya proposant, à la suite d'autres ulémas de son époque, que les 7 cieux correspondraient à 7 sphères célestes au niveau desquelles les astres sont fixes ou semi-mobiles) d'autres ulémas contemporains n'auraient pas proposé une autre tentative d'explication

Il faut d'ailleurs noter ici que l'argumentation sur laquelle repose l'avis disant que la falak de la lune est forcément la même chose que l'un des sept cieux, cette argumentation n'est pas décisive (ghayr qat'î). En effet, la même particule "" peut désigner des choses différentes, en des versets différents :
- Dans "fî anfusikum" il s'agit bien de ce qui est "en vous-mêmes".
- En revanche, le nuage que Dieu "étend dans le ciel" : "اللَّهُ الَّذِي يُرْسِلُ الرِّيَاحَ فَتُثِيرُ سَحَابًا فَيَبْسُطُهُ فِي السَّمَاء كَيْفَ يَشَاء وَيَجْعَلُهُ كِسَفًا فَتَرَى الْوَدْقَ يَخْرُجُ مِنْ خِلَالِهِ" (Coran 30/48) n'est pourtant pas véritablement "dans le ciel" : il est en réalité : "السَّحَابِ الْمُسَخِّرِ بَيْنَ السَّمَاء وَالأَرْضِ" : "suspendu entre le ciel et la Terre" (Coran 2/164).
- Aussi, pareillement, quand la lune est dite : "fi-s-samâwât is-sab'", cela n'implique pas forcément qu'elle soit véritablement "dans" les sept cieux (comme elle est véritablement "dans" une falak) ; cela peut très bien signifier que, vue de la Terre par les humains, elle apparaît être dans les cieux, même si elle n'est que "suspendue" entre la Terre et le premier ciel ; exactement comme le nuage a été dit "fi-s-samâ'", alors que dans la réalité il n'est que "suspendu" entre la Terre et le ciel (d'autres exemples sont visibles dans d'autres versets du Coran. Lire notre article : Comment comprendre le verset qui dit que le soleil se couche dans une source boueuse ? ainsi que notre article : Ce que le Coran dit des étoiles filantes est-il anti-scientifique ?).

En tous cas j'ai trouvé 2 avis contemporains quant à l'identité des 7 cieux

Selon un premier avis (de M. Y. Kassab) :
- le premier ciel correspond au système solaire ;
- le second est formé par les amas d'étoiles supposées être issues de la même structure initiale que le système solaire ;
- le troisième est ce qui enveloppe notre galaxie, la Voie lactée ;
- le quatrième correspond à l'Amas local : il s'agit d'un ensemble regroupant notre galaxie ainsi qu'une vingtaine d'autres ;
- le cinquième correspond au Super amas de la Vierge : il s'agit d'un ensemble plus grand que le précédent ;
- le sixième est constitué de l'univers tout entier ;
- le septième domine la création (Gloire à Dieu, pp. 252-257).

Selon un autre avis (de Muhammad Tahir al-Qadrî) :
Quand, de la Terre, nous regardons vers le ciel, on se trouve "entouré de sept domaines magnétiques différents", chacun plus éloigné de nous que le précédent, dans l'espace gigantesque qui se déroule progressivement à notre esprit :
- il y a d'abord le système solaire ;
- puis il y a notre galaxie, la Voie lactée ;
- puis il y a l'Amas local : il s'agit d'un ensemble regroupant notre galaxie ainsi qu'une vingtaine d'autres ;
- puis surgit un ensemble d'agglomérats de galaxies : il s'agit d'un ensemble plus grand que le précédent ;
- il y a ensuite la bande cosmique représentée par les quasars ;
- il y a ensuite le domaine de l'univers tout entier ;
- puis c'est le bord de l'univers (Le Qur'an au sujet de la création et de l'expansion de l'univers, pp. 75-76 ; si j'ai cité ici l'avis de Tâhir al-Qâdrî, c'est seulement sur ce point précis, et cela ne signifie pas que j'approuve les croyances totalement erronées qu'il a par ailleurs).

Si on retient que la fin du système solaire correspond au premier ciel, alors, dans le verset : "Nous avons embelli le ciel le plus bas par un embellissement : les kawkab" (Coran 37/6), le terme "kawkab" désigne forcément les planètes du soleil et non pas toutes les étoiles ; et "planète" est bel et bien l'un des sens du terme kawkab (cf. Gloire à Dieu, p. 309).

Par ailleurs, dans le passage relatant les propos du groupe de djinns étant allés s'enquérir de la raison de l'impossibilité pour eux de dérober des informations du ciel, il est dit ceci, qui peut nous interpeler quant à la localisation du premier ciel : "وَأَنَّا لَمَسْنَا السَّمَاء فَوَجَدْنَاهَا مُلِئَتْ حَرَسًا شَدِيدًا وَشُهُبًا {72/8} وَأَنَّا كُنَّا نَقْعُدُ مِنْهَا مَقَاعِدَ لِلسَّمْعِ فَمَن يَسْتَمِعِ الْآنَ يَجِدْ لَهُ شِهَابًا رَّصَدًا {72/9} وَأَنَّا لَا نَدْرِي أَشَرٌّ أُرِيدَ بِمَن فِي الْأَرْضِ أَمْ أَرَادَ بِهِمْ رَبُّهُمْ رَشَدًا {72/10" : "Et nous avons touché le ciel et l'avons trouvé être empli d'une garde solide et de flammes. Et nous nous asseyions en des lieux du (ciel) pour écouter, or celui qui s'(y) assoit maintenant trouve pour lui une flamme prête" (Coran 72/8-10). Etant donné que les météorites se consument au contact de l'atmosphère, est-ce à dire que c'est la fin de l'atmosphère terrestre qui correspond au premier ciel ? Pas sûr, car, comme Cheikh Thânwî l'a écrit, ce verset n'implique pas que les djinns parvenaient au premier ciel : il peut s'agir de lieux élevés par rapport à la Terre, et c'est ce qui a été décrit comme "ciel" (Bayân ul-qur'ân). Et puis, il ne semble pas probable que, étant parvenus jusqu'à la lune, on puisse dire des humains auraient alors dépassé le premier ciel.

En tous cas ce n'étaient là que deux tentatives d'explications, deux propositions

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Quel est le sens de cette immense création ?

Cette immense création, Dieu l'a faite pour permettre à l'homme et au djinn d'y vivre l'épreuve de la vie sur Terre. "Et Il est Celui qui a créé les cieux et la Terre en six jours – alors que Son Trône était sur l'eau – afin de vous mettre à l'épreuve : lequel d'entre vous est meilleur en actes" (Coran 11/7). Cliquez ici et ici pour lire d'autres articles sur le sujet.

Par ailleurs, il n'est pas impossible – même si nous ne pouvons non plus l'affirmer – qu'il existe, dans cet immense univers, d'autres planètes qui accueillent d'autres créatures comparables aux humains de la Terre. Lire notre article qui parle des sept terres.

Lire aussi un autre de nos articles : "Dieu regarde-t-Il vraiment les croyances, les pensées et les actions de l'homme, alors que celui-ci n'est qu'une poussière dans l'immensité du cosmos ?"

Wallâhu A'lam (Dieu sait mieux).

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