Le Prophète (sur lui la paix) a dit à Wâbissa : "Demande la fatwa à ton cœur, demande la fatwa à ton âme. Le bien est ce à propos de quoi l'âme se tranquillise et le cœur se tranquillise. Le péché est ce qui se trame dans l'âme et qui va et vient dans le cœur, même si on te donne des fatwas sur le sujet" (Riyâd us Sâlihîn). Certains voient dans ce propos la preuve que les hommes pieux n'ont pas besoin de se référer aux sources du Coran et des hadîths mais n'ont qu'à consulter leur cœur. Est-ce vrai ?
Ce qui est important ici, c'est de bien cerner le domaine concerné par ce hadîth.
De fait, le Prophète (sur lui la paix) n'a pas, dans ce hadîth, voulu exhorter les musulmans à se baser sur leur cœur pour pratiquer de nouvelles formes cultuelles autres que celles qu'il a enseignées. Il n'a pas voulu non plus les exhorter à se baser sur leur cœur pour voir si des actes ou des choses (autres que cultuelles) sont obligatoires, permis ou interdits. Car il n'aurait pas, alors, laissé sa Sunnah (ensemble des hadîths), et n'aurait pas mis en garde sa Communauté (ummah) contre les innovations (bid'ah).
Le Hadîth cité ci-dessus ne concerne en fait que les actes et les choses qui :
- ne relèvent pas de ce qui est purement cultuel ;
- n'ont pas été clairement déclarés obligatoires, autorisés ou interdits dans le Coran ou les hadîths ;
- mais sont douteux.
Ce hadîth se réfère donc en fait à la même chose que celle à laquelle se réfère cet autre hadîth bien connu : "Le licite est clair et l'illicite est clair. Entre les deux se trouvent des choses douteuses à propos de quoi la plupart des gens ne connaissent pas (la règle). Celui qui se préserve des choses douteuses recherche la préservation dans sa religion et son honneur. Et celui qui tombe dans les choses douteuses, proche est le moment où il tombera dans l'illicite..." (al-Bukhârî).
La recommandation du Prophète, dans ce hadîth "Demande la fatwa à ton cœur, demande la fatwa à ton âme", est donc de délaisser tout acte ou toute chose à cause du doute qu'il ou qu'elle renferme, doute qui empêche le cœur d'être serein. (Cf. Al-I'tisâm, ash-Shâtibî, 2/153 à 159, et aussi Mirqâtul mafâtîh, Alî al-Qârî, 6/45.) Il ne s'agit donc en aucun cas d'une possibilité de se fonder uniquement sur son cœur pour distinguer ce qui est permis de ce qui est interdit.
Wallâhu A'lam (Dieu sait mieux).
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