Quelle différence entre khimâr, hijâb et jilbâb ?

Question :

D'accord, le verset de la sourate an-Nûr : "Et dis aux croyantes qu'elles baissent de leur regard, qu'elles restent chastes, qu'elles ne montrent de leurs parures que ce qui en paraît et qu'elles ramènent sur leur encolure leur khimâr…" peut, d'après l'interprétation de Ibn Abbâs, ne concerner que le foulard porté sur la chevelure – al-khimâr – et non le voile sur le visage, comme vous l'avez dit.

Mais le verset de la sourate al-Ahzâb : "O Prophète, dis à tes épouses, à tes filles et aux épouses des croyants qu'elles ramènent sur elles leur jilbâb. Ceci sera à même qu'elles soient reconnues et n'en soient alors point offensées", peut-il signifier autre chose que le voile du visage, vu qu'il y est demandé de tirer le jilbâb sur soi ? N'a-t-il pas été révélé après celui de an-Nûr, venant apporter quelque chose de supplémentaire, à savoir forcément l'obligation de se couvrir le visage ?

De plus, on lit dans ce verset : "Ceci sera à même qu'elles soient reconnues" : le port du voile aurait donc bien, contrairement à ce que vous avez écrit, comme objectif d'exprimer qu'on est musulmane.

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Réponse :

Apporter des éléments de réponse à vos questions ne peut se faire qu'en plusieurs points… Mais avant tout, je vous prie de lire l'article suivant : L'islam a-t-il rendu obligatoire pour la musulmane de se voiler le visage ?, pour y découvrir les avis des savants à propos de la question du voile du visage. Ici nous aborderons le sujet sous un angle quelque peu différent, quoique complémentaire...

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I) Les passages coraniques qui parlent du "voile féminin" : le verset dit "du khimâr" (sourate an-Nûr), et le verset dit "du jilbâb" (sourate al-Ahzâb) :

Il y a effectivement les deux versets que vous avez cités :

le verset de la sourate an-Nûr (24ème sourate du texte coranique), qui évoque le "khimâr" : "وَقُل لِّلْمُؤْمِنَاتِ يَغْضُضْنَ مِنْ أَبْصَارِهِنَّ وَيَحْفَظْنَ فُرُوجَهُنَّ وَلَا يُبْدِينَ زِينَتَهُنَّ إِلَّا مَا ظَهَرَ مِنْهَا وَلْيَضْرِبْنَ بِخُمُرِهِنَّ عَلَى جُيُوبِهِنَّ وَلَا يُبْدِينَ زِينَتَهُنَّ إِلَّا لِبُعُولَتِهِنَّ أَوْ آبَائِهِنَّ أَوْ آبَاء بُعُولَتِهِنَّ أَوْ أَبْنَائِهِنَّ أَوْ أَبْنَاء بُعُولَتِهِنَّ أَوْ إِخْوَانِهِنَّ أَوْ بَنِي إِخْوَانِهِنَّ أَوْ بَنِي أَخَوَاتِهِنَّ أَوْ نِسَائِهِنَّ أَوْ مَا مَلَكَتْ أَيْمَانُهُنَّ أَوِ التَّابِعِينَ غَيْرِ أُوْلِي الْإِرْبَةِ مِنَ الرِّجَالِ أَوِ الطِّفْلِ الَّذِينَ لَمْ يَظْهَرُوا عَلَى عَوْرَاتِ النِّسَاء وَلَا يَضْرِبْنَ بِأَرْجُلِهِنَّ لِيُعْلَمَ مَا يُخْفِينَ مِن زِينَتِهِنَّ وَتُوبُوا إِلَى اللَّهِ جَمِيعًا أَيُّهَا الْمُؤْمِنُونَ لَعَلَّكُمْ تُفْلِحُونَ" : "Dis aux croyants qu'ils baissent leur regard et qu'ils restent chastes. Ceci est cause de plus de pureté pour eux. Dieu est informé de ce qu'ils font. Et dis aux croyantes qu'elles baissent de leur regard ; qu'elles restent chastes ; qu'elles ne montrent pas leurs parures, sauf ce qui en paraît ; qu'elles ramènent leur khimâr sur leur encolure ; et qu'elles ne montrent pas leurs parures, sauf à leur mari, ou à leur père (...)" (Coran 24/31) ;

et le verset de la sourate al-Ahzâb (33ème sourate du texte coranique), qui évoque le "jilbâb" : "يَا أَيُّهَا النَّبِيُّ قُل لِّأَزْوَاجِكَ وَبَنَاتِكَ وَنِسَاء الْمُؤْمِنِينَ يُدْنِينَ عَلَيْهِنَّ مِن جَلَابِيبِهِنَّ ذَلِكَ أَدْنَى أَن يُعْرَفْنَ فَلَا يُؤْذَيْنَ وَكَانَ اللَّهُ غَفُورًا رَّحِيمًا" : "O Prophète, dis à tes épouses, à tes filles et aux épouses des croyants qu'elles rapprochent sur elles de leur jilbâb. Ceci sera plus à même qu'elles soient reconnues et ne soient alors point offensées. Et Dieu est pardonnant, miséricordieux" (Coran 33/59).

En fait il y a également un troisième verset :
le verset de la sourate al-Ahzâb (33ème sourate du texte coranique) : "يَا أَيُّهَا الَّذِينَ آمَنُوا لَا تَدْخُلُوا بُيُوتَ النَّبِيِّ إِلَّا أَن يُؤْذَنَ لَكُمْ إِلَى طَعَامٍ غَيْرَ نَاظِرِينَ إِنَاهُ وَلَكِنْ إِذَا دُعِيتُمْ فَادْخُلُوا فَإِذَا طَعِمْتُمْ فَانتَشِرُوا وَلَا مُسْتَأْنِسِينَ لِحَدِيثٍ إِنَّ ذَلِكُمْ كَانَ يُؤْذِي النَّبِيَّ فَيَسْتَحْيِي مِنكُمْ وَاللَّهُ لَا يَسْتَحْيِي مِنَ الْحَقِّ وَإِذَا سَأَلْتُمُوهُنَّ مَتَاعًا فَاسْأَلُوهُنَّ مِن وَرَاء حِجَابٍ ذَلِكُمْ أَطْهَرُ لِقُلُوبِكُمْ وَقُلُوبِهِنَّ وَمَا كَانَ لَكُمْ أَن تُؤْذُوا رَسُولَ اللَّهِ وَلَا أَن تَنكِحُوا أَزْوَاجَهُ مِن بَعْدِهِ أَبَدًا إِنَّ ذَلِكُمْ كَانَ عِندَ اللَّهِ عَظِيمًا", qui contient cette phrase : "وَإِذَا سَأَلْتُمُوهُنَّ مَتَاعًا فَاسْأَلُوهُنَّ مِن وَرَاء حِجَابٍ" : "Et si vous demandez à (ses épouses) quelque objet, demandez-le leur derrière un rideau ("min warâ'ï hijâb")" (Coran 33/53).

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Que signifie la double exception, présente dans le verset de sourate an-Nûr (24/31) quant au fait de montrer ses parures : l'exception de "ce qu'il en paraît" (إِلَّا مَا ظَهَرَ مِنْهَا), et l'exception "du mari, du père, etc." (إِلَّا لِبُعُولَتِهِنَّ أَوْ آبَائِهِنَّ أَوْ آبَاء بُعُولَتِهِنَّ أَوْ) ?

--- La première exception ("إِلَّا مَا ظَهَرَ مِنْهَا", "sauf ce qui en paraît") parle de la Parure Zâhira, et s'applique aux personnes Ajânib (c'est-à-dire les personnes autres que celles mentionnées dans la seconde exception) : en présence de personnes Ajânib, la femme ne doit laisser découvert, des parties de son corps portant sa parure (ses bijoux), que : "ce qui en paraît" (لا تبدي المؤمنة أمام الرجال الأجانب إلا مواضع زينتها الظاهرة - وهي الكحل والخاتم).

--- Quant à la seconde exception ("إِلَّا لِبُعُولَتِهِنَّ أَوْ آبَائِهِنَّ أَوْ آبَاء بُعُولَتِهِنَّ أَوْ", "sauf à leur mari, ou à leur père, ou à leur beau-père, ou..."), elle parle des personnes non-Ajânib (il s'agit du Mari, mais aussi des Mahârim : le père, le frère, etc.), et s'applique à la parure Bâtina (c'est-à-dire la parure autre que celle mentionnée dans la première exception) : en présence de personnes non-ajânib, la femme peut laisser découvertes des parties de son corps portant sa parure bâtina (تبدي المؤمنة مواضع زينتها الباطنة - وهي التاج والقلادة والسوار وغيرها - أمام زوجها ومحارمها) ; l'étendue de ce qu'elle peut laisser ainsi dévoilé devant les personnes listées diffère ensuite selon ces personnes.

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Et que signifient les termes du verset de la sourate al-Ahzâb disant : "elles en seront reconnues et ne seront alors pas offensées" (ذَلِكَ أَدْنَى أَن يُعْرَفْنَ فَلَا يُؤْذَيْنَ) ?

Le passage entier montre que certains Hypocrites, à Médine, tenaient des propos déplacés à propos de certaines femmes lorsque celles-ci passaient près de là où ils se trouvaient : "يَا أَيُّهَا النَّبِيُّ قُل لِّأَزْوَاجِكَ وَبَنَاتِكَ وَنِسَاء الْمُؤْمِنِينَ يُدْنِينَ عَلَيْهِنَّ مِن جَلَابِيبِهِنَّ ذَلِكَ أَدْنَى أَن يُعْرَفْنَ فَلَا يُؤْذَيْنَ وَكَانَ اللَّهُ غَفُورًا رَّحِيمًا لَئِن لَّمْ يَنتَهِ الْمُنَافِقُونَ وَالَّذِينَ فِي قُلُوبِهِم مَّرَضٌ وَالْمُرْجِفُونَ فِي الْمَدِينَةِ لَنُغْرِيَنَّكَ بِهِمْ ثُمَّ لَا يُجَاوِرُونَكَ فِيهَا إِلَّا قَلِيلًا مَلْعُونِينَ أَيْنَمَا ثُقِفُوا أُخِذُوا وَقُتِّلُوا تَقْتِيلًا سُنَّةَ اللَّهِ فِي الَّذِينَ خَلَوْا مِن قَبْلُ وَلَن تَجِدَ لِسُنَّةِ اللَّهِ تَبْدِيلًا" (Coran 33/59-62). Le verset 33/59 mentionne l'avantage que recèle le fait de se couvrir tout le corps sauf le visage et les mains : "ذَلِكَ أَدْنَى أَن يُعْرَفْنَ فَلَا يُؤْذَيْنَ" : "Ceci sera plus à même qu'elles soient reconnues et ne soient alors point offensées".
Je dis bien "l'avantage" (hikma thânawiyya), car la raison première (hikma ûlâ / 'illa ghâ'iyya) ayant motivé cette règle (devoir couvrir tout le corps sauf le visage, les mains et, d'après un avis, les pieds) n'est pas : "permettre cette reconnaissance" (chez autrui), mais tout simplement : "recouvrir, par rapport aux regards des personnes de l'autre sexe, ce qui constitue les attraits physiques, afin que les atours féminins ne soient pas visibles en public" ("ce qui relève des attraits physiques" étant alors la 'illa fâ'iliyya li hukm ish-shâri'). C'est seulement par incidence que la pratique de cette norme "est plus à même que la dame en est alors reconnue comme ayant de la réserve".

Cela est comparable au fait de devoir garder la barbe : cette règle est motivée par le fait que la barbe relève de la beauté masculine et de la plénitude de l'apparence de l'homme ('illa fâ'iliyya), et qu'il s'agit donc pour l'homme de parvenir à la plénitude de l'apparence masculine ('illa ghâ'iyya / hikma ûlâ) ; cependant, cette règle avait pour avantage (hikma thânawiyya), par rapport aux Perses de l'époque du Prophète (sur lui soit la paix), de se démarquer d'eux (vu qu'eux ne la gardaient pas)...

D'autres versets coraniques sont comparables : Joseph justifia son refus des avances de Zuleykha par le fait qu'il ne voulait pas trahir la confiance du mari de Zuleykha qui l'avait bien accueilli, car cela constituerait de l'abus et de l'injustice de sa part ; or cela ne veut pas dire que si le mari de Zuleykha ne l'avait pas bien accueilli, là il aurait accepté les avances de son épouse. Ce qu'il mentionna ne fut pas la seule, ni la principale, motivation de son refus : ce n'était là qu'un aspect des choses, qu'il présenta à Zuleykha parce que cette raison-là était susceptible de la persuader : "وجملة إنه ربي أحسن مثواي تعليل للامتناع الكائن منه ببعض الأسباب التي هي أقرب إلى فهم امرأة العزيز(...). وجملة إنه لا يفلح الظالمون تعليل آخر للامتناع منه عن إجابتها" (Fat'h ul-Qadîr, ash-Shawkânî). De même : "وليست لام التعليل مُقتضية حَصْرَ الغرض من الفعل المعلل في تلك العلة؛ فإن كثيراً من الأشياء تكون لها أسباب كثيرة فيذكر بعضها ممّا يقتضيه المقام" (At-Tahrîr wa-t-Tanwîr, commentaire de Sourate Al-Fat'h).

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Que signifie donc cet avantage : "ذَلِكَ أَدْنَى أَن يُعْرَفْنَ فَلَا يُؤْذَيْنَ" : "qu'elles soient reconnues et ne soient alors point offensées" ?

De nombreux ulémas ont commenté ces termes ainsi : "Cela sera plus à même qu'elles soient reconnues comme étant des femmes libres et non pas des esclaves, et qu'elles ne soient donc point offensées". Et cela à cause du Réel précis qui existait alors à Médine : les voyous n'importunaient que les femmes esclaves, et pas les femmes libres (voir les ouvrages de Tafsîr, où on trouve cette circonstance de révélation).

Ibn Hazm n'a pas adopté le commentaire que nous venons de voir et s'en est au contraire démarqué : قد ذهب بعض من وهل في قول الله تعالى: {يدنين عليهن من جلابيبهن ذلك أدنى أن يعرفن فلا يؤذين} إلى أنه إنما أمر الله تعالى بذلك لأن الفساق كانوا يتعرضون للنساء للفسق؛ فأمر الحرائر بأن يلبسن الجلابيب ليعرف الفساق أنهن حرائر فلا يعترضوهن. قال علي: ونحن نبرأ من هذا التفسير الفاسد، الذي هو إما زلة عالم ووهلة فاضل عاقل، أو افتراء كاذب فاسق؛ لأن فيه أن الله تعالى أطلق الفساق على أعراض إماء المسلمين. وهذه مصيبة الأبد! وما اختلف اثنان من أهل الإسلام في أن تحريم الزنى بالحرة كتحريمه بالأمة، وأن الحد على الزاني بالحرة كالحد على الزاني بالأمة ولا فرق، وأن تعرض الحرة في التحريم كتعرض الأمة ولا فرق. ولهذا وشبهه وجب أن لا يقبل قول أحد بعد رسول الله - صلى الله عليه وسلم - إلا بأن يسنده إليه - عليه السلام -" (Al-Muhallâ 2/249). Ibn Hazm veut dire que le commentaire cité plus haut impliquerait que le Coran a, par cette mesure, cherché à protéger les femmes libres, mais n'a rien fait pour protéger les femmes esclaves.
Le commentaire qui va avec l'avis de Ibn Hazm est celui-ci : "Cela sera plus à même qu'elles soient reconnues comme étant des femmes cherchant à couvrir leurs attraits et ne cherchant donc pas ce genre de jeux de séduction" (d'après Hijâb ul-mar'at il-muslima, al-Albânî, pp. 42-43 : "هذا وقد أبان الله تعالى عن حكمة الأمر بإدناء الجلباب بقوله: {ذَلِكَ أَدْنَى أَنْ يُعْرَفْنَ فَلا يُؤْذَيْنَ} يعني أن المرأة إذا التحفت بالجلباب عرفت بأنها من العفائف المحصنات الطيبات فلا يؤذيهن الفساق بما لا يليق من الكلام").

As-Sa'dî a réuni les deux commentaires en ces termes : "دل على وجود أذية إن لم يحتجبن. وذلك لأنهن إذا لم يحتجبن، ربما ظن أنهن غير عفيفات، فيتعرض لهن من في قلبه مرض فيؤذيهن؛ وربما استهين بهن وظن أنهن إماء، فتهاون بهن من يريد الشر. فالاحتجاب حاسم لمطامع الطامعين فيهن" (Tafsîr us-Sa'dî). Ar-Râzî écrit de même : "وقوله: {ذلك أدنى أن يعرفن فلا يؤذين}: قيل: يعرفن أنهن حرائر فلا يتبعن. ويمكن أن يقال: المراد: يعرفن أنهن لا يزنين، لأن من تستر وجهها مع أنه ليس بعورة لا يطمع فيها أنها تكشف عورتها فيعرفن أنهن مستورات لا يمكن طلب الزنا منهن" (Tafsîr ul-Fakhr ir-Râzî).

Dès lors :
--- toute femme qui s'habille ainsi, un effet (athar thânawî) de sa tenue est que celle-ci exprime que cette femme a, en ce qui concerne sa tenue vestimentaire, la pudeur obligatoire complète (l'expression de la pudeur est une chose ; ensuite la réalité peut y correspondre, ou peut ne pas y correspondre, puisque la pudeur ne concerne pas que l'extérieur, mais est aussi un comportement, une façon d'être, etc.) ;
--- a contrario, toute femme qui ne s'habille pas ainsi n'a pas, sa tenue vestimentaire n'exprime pas la pudeur obligatoire complète (ce qui n'empêche pas qu'elle ait néanmoins une part de cette pudeur complète).

Cette expression constituant seulement un avantage secondaire (hikma thânawiyya), l'applicabilité de la règle n'est pas reliée à elle ; la règle demeure même si, dans la société où l'on vit, ce genre de comportements déplacés de la part de certains hommes ne sont pas présents.
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Les mujtahidûn ont été consensuels quant au fait que la femme libre, sa chevelure ainsi que tout son corps est 'awra ; il n'y a eu divergence, entre les mujtahidûn, qu'au sujet de son visage et de ses mains [ainsi que de ses pieds].
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--- "مسألة: وستر العورة فرض عن عين الناظر، وفي الصلاة جملة، كان هنالك أحد أو لم يكن. قال الله تعالى: {قل للمؤمنين يغضوا من أبصارهم ويحفظوا فروجهم}، {وقل للمؤمنات يغضضن من أبصارهن ويحفظن فروجهن}؛ فمن أبدى فرجه لغير من أبيح له فقد عصى الله تعالى. وقال تعالى: {خذوا زينتكم عند كل مسجد} فاتفق على أنه ستر العورة" (
Al-Muhallâ, Ibn Hazm, mas'ala n° 346).
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"واتفقوا على أن الفرج والدبر* عورة. (...) واتفقوا على أن شعر الحرة وجسمها - حاشا وجهها ويدها - عورة؛ واختلفوا في الوجه واليدين حتى أظفارهما أعورة هي أم لا" (Marâtib ul-ijmâ', Ibn Hazm) (*من الرجل).
--- "مسألة: والعورة المفترض سترها على الناظر وفي الصلاة: من الرجل: الذكر وحلقة الدبر فقط - وليس الفخذ منه عورة -؛ وهي من المرأة: جميع جسمها، حاشا الوجه، والكفين فقط؛ الحر والعبد، والحرة والأمة، سواء في كل ذلك ولا فرق" (
Al-Muhallâ, mas'ala n° 346).

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– Dans le passage où ce dernier extrait figure, Ibn Hazm a relaté une divergence d'avis entre les mujtahidûn quant à la question de savoir s'il y a(vait) une différence entre la 'awra de la femme esclave et celle de la femme libre (Al-Muhallâ, 2/252-255), mais n'a pour sa part pas fait de différence entre la 'awra des femmes libres et celle des femmes esclaves. Il écrit : "La religion de Dieu est unique, et le physique et la nature sont les mêmes aussi bien chez les esclaves que chez les libres. Sauf si un texte est présent qui distingue les deux au sujet de quelque chose, auquel cas on s'en tiendra à ce qu'il dit" : "وأما الفرق بين الحرة والأمة فدين الله تعالى واحد، والخلقة والطبيعة واحدة، كل ذلك في الحرائر والإماء سواء، حتى يأتي نص في الفرق بينهما في شيء فيوقف عنده" (Al-Muhallâ, 2/248-249, en commentaire de la mas'alah n° 349).
Certains ulémas hanbalites sont du même avis : il n'y a pas de différence entre la 'awra de la femme esclave et celle de la femme libre(Al-Mughnî 9/313).

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La plupart des ulémas sont cependant d'avis que la femme esclave qui effectuait des tâches domestiques, sa 'awra était réduite : elle n'était pas dans l'obligation de se couvrir la chevelure, les avants-bras et le bas des jambes.

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Ibn Taymiyya a apporté la synthèse : la règle de base est que la 'awra de la femme esclave est la même que la 'awra de la femme libre ; mais c'est par volonté d'allègement (takhfîf) en ce qui concerne une femme qui doit vaquer à de nombreuses occupations et sortir à plusieurs reprises sans en avoir vraiment le choix (puisque esclave) que la Shar' a prescrit une 'awra allégée pour la femme esclave . "الأصل أن عورة الأمة كعورة الحرة، كما أن عورة العبد كعورة الحر. لكن لما كانت مظنة المهنة والخدمة وحرمتها تنقص عن حرمة الحرة، رخص لها في إبداء ما تحتاج إلى إبدائه وقطع شبهها بالحرة وتمييز الحرة عليها. وذلك يحصل بكشف ضواحيها من رأسها وأطرافها الأربعة. فأما الظهر والصدر فباق على الأصل" (Shar'hu Umdat il-fiqh).
Anas ibn Mâlik relate : "عن أنس بن مالك قال: "كن إماء عمر رضي الله عنه يخدمننا كاشفات عن شعورهن تضرب ثديهن" (As-Sunan ul-kub'râ li-l-Bayhaqî) : "يعني أن شعورهن تضرب صدورهن من سرعة الحركة والدأب في الخدمة. أما بلفظ: "تَضْطَرِبُ ثُدِيُّهُنَّ"، فغير صحيح" (islamqa.info). Après avoir rapporté ce propos de Anas, al-Bayhaqî décrit comme awra ce que nous avons cité plus haut : "والآثار عن عمر بن الخطاب رضي الله عنه في ذلك صحيحة، وإنها تدل على أن رأسها ورقبتها وما يظهر منها في حال المحنة ليس بعورة" (As-Sunan ul-kub'râ li-l-Bayhaqî). Cet avis est en fait l'un des avis des hanbalites : "والأمة يباح النظر منها إلى ما يظهر غالبا، كالوجه، والرأس، واليدين، والساقين. لأن عمر رضي الله عنه (...) وروى أبو حفص بإسناده أن عمر كان لا يدع أمة تقنع في خلافته، وقال: "إنما القناع للحرائر"؛ ولو كان نظر ذلك منها محرما لم يمنع من ستره" (Al-Mughnî 9/313).

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– Cela ne veut pas dire que ces ulémas permettraient de regarder avec désir les attraits d'une esclave qui passe mais qui ne relèvent pas de la awra chez elle ; bien au contraire, ils ont, ici et là, explicitement précisé que ce genre de regard est interdit même par rapport à une esclave. Tout ce que cela veut dire est que ces écoles ne considèrent pas que l'esclave a la même awra que la femme libre.
Quant au regard sans désir porté sur ce qui, chez une femme esclave, ne fait pas partie de la awra, alors même que chez la femme libre elle fait partie de la awra (comme la chevelure), est-ce que ces ulémas l'autorisaient, ou pas, je ne sais pas vraiment (لا أدري). 'Atâ, qui habitait La Mecque, a dit pour sa part qu'il était mauvais de regarder les femmes esclaves qui étaient au marché de La Mecque, sauf pour qui voulait acheter : "وكره عطاء النظر إلى الجواري التي يبعن بمكة إلا أن يريد أن يشتري" (cité par al-Bukhârî ta'lîqan, kitâb ul-istîdhân, bâb 2). Ibn ul-Uthaymîn fait valoir que Ibn Taymiyya est d'avis que même si la femme esclave pouvait se découvrir ces parties, cela ne signifie pas que les hommes avaient le droit de les regarder : "وأما في باب النَّظر: فقد ذكر الفقهاءُ رحمهم الله تعالى أن عورة الأَمَة أيضاً ما بين السُّرَّة والرُّكبة، ولكن شيخ الإسلام رحمه الله في باب النَّظر عارض هذه المسألة، كما عارضها ابن حزم في باب النَّظر وفي باب الصَّلاة" (Ash-Shar'h ul-Mumti').

Quant à la parole que Omar ibn ul-Khattâb (radhiyallâhu 'anh) avait dite à une femme-esclave : "اكشفي رأسك ولا تشبهي بالحرائر" : "Découvre ta chevelure, et n'imite pas les femmes libres" (Ibn Abî Shayba, Abd ur-Razzâq, al-Bayhaqî), elle ne signifie pas que l'objectif du foulard était de distinguer la femme libre de la femme esclave, mais que, vu que la femme esclave n'avait pas l'obligation de se couvrir la chevelure (et cela à cause de l'allègement suscité), le foulard était devenu par incidence un élément vestimentaire qui était porté par les femmes libres, la plupart des femmes esclaves ne le portant pas (car n'y étant pas astreintes). Omar (radhiyallâhu 'anh) demanda alors à cette femme esclave de ne pas le porter.

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– Par ailleurs, Ibn Taymiyya fait valoir, que cette mesure d'allègement (takhfîf) est telle que si le contexte change, la règle changera : il dit donc que, pour son époque à lui, les esclaves d'origine turque ne pouvaient pas être autorisées à se découvrir la chevelure : "وقد كانت الإماء على عهد الصحابة يمشين في الطرقات وهن متكشفات الرءوس وتخدم الرجال مع سلامة القلوب. فلو أراد الرجل أن يترك الإماء التركيات الحسان يمشين بين الناس في مثل هذه البلاد والأوقات كما كان أولئك الإماء يمشين، كان هذا من باب الفساد" (MF 15/418, 21/250). Ibn ul-Uthaymîn relate de lui : "وقال شيخ الإسلام ابن تيمية رحمه الله: إنَّ الإماء في عهد الرسول عليه الصَّلاة والسَّلام وإن كُنَّ لا يحتجبن كالحرائر، لأن الفتنة بهنَّ أقلُّ، فَهُنَّ يُشبهنَ القواعدَ من النِّساء اللاتي لا يرجون نكاحاً، قال تعالى فيهن: {فَلَيْسَ عَلَيْهِنَّ جُنَاحٌ أَنْ يَضَعْنَ ثِيَابَهُنَّ غَيْرَ مُتَبَرِّجَاتٍ بِزِينَةٍ}. يقول: وأما الإماء التركيَّات الحِسَان الوجوه، فهذا لا يمكن أبداً أن يَكُنَّ كالإماء في عهد الرسول عليه الصَّلاة والسَّلام، ويجب عليها أن تستر كلَّ بدنها عن النَّظر، في باب النَّظر" (Ash-Shar'h ul-Mumti').

Al-Qurtubî avait relaté la même chose de ulémas antérieurs à Ibn Taymiyya : كان عمر رضي الله عنه إذا رأى أمة قد تقنعت ضربها بالدرة، محافظة على زي الحرائر. وقد قيل: إنه يجب الستر والتقنع الآن في حق الجميع من الحرائر والإماء. وهذا كما أن أصحاب رسول الله صلى الله عليه وسلم منعوا النساء المساجد بعد وفاة رسول الله صلى الله عليه وسلم مع قوله: "لا تمنعوا إماء الله مساجد الله"، حتى قالت عائشة رضي الله عنها: "لو عاش رسول الله صلى الله عليه وسلم إلى وقتنا هذا لمنعهن من الخروج إلى المساجد كما منعت نساء بني إسرائيل" (Tafsîr ul-Qurtubî).

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En tout état de cause, cette phrase : "ذَلِكَ أَدْنَى أَن يُعْرَفْنَ فَلَا يُؤْذَيْنَ" : "Ceci sera plus à même qu'elles soient reconnues et ne soient alors point offensées", cette phrase ne signifie pas que l'objectif du port du jilbâb soit que celles qui le portent soient reconnues comme étant des femmes libres. Ni qu'elles soient reconnues comme étant des musulmanes (comme cela a été affirmé dans la question).

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II) Ces deux versets coraniques, l'un du khimâr et l'autre du jilbâb, enseignent-ils la même chose ? ou bien l'un offre-t-il un impératif supplémentaire par rapport à l'autre ?

Répondre à cette question demande que l'on détermine deux choses :
- y a-t-il une différence entre le khimâr et le jilbâb ?
- lequel des deux passages coraniques fut révélé en premier, lequel fut révélé ensuite ?

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II.1) Quelle différence y a-t-il entre le khimâr et le jilbâb ?

Le khimâr couvre les cheveux (Mufradât ur-Râghib).

Quant au jilbâb, qu'est-ce donc ? S'agit-il de la même chose que le khimâr, ou bien s'agit-il de quelque chose de plus ample ?
Les avis sont divergents sur le sujet, et Ibn Hajar a cité quelques 7 vêtements qui entrent dans l'acception du terme "jilbâb" (Fat'h ul-bârî 1/549). On peut dire ici que deux choses reviennent essentiellement :
Possibilité 1 : le jilbâb est la même chose que le khimâr ("qîla : al-khimâr") ;
Possibilité 2 : le jilbâb est différent du khimâr : il s'agit d'une sorte de grand pardessus que les femmes portaient sur leur robe et leur khimâr ("al-malâ'a").

Une chose est certaine : certaines femmes utilisaient leur jilbâb pour se couvrir le visage également. Aïcha raconte ainsi, dans le récit de ce qui conduisit à la calomnie : "Je me couvris alors le visage de mon jilbâb" (rapporté par al-Bukhârî 3910, 4473, Muslim 2770).
Cependant, ce que ce récit montre c'est seulement que le jilbâb peut être utilisé pour couvrir le visage. Il ne dit pas que le jilbâb est la même chose que le khimâr, ou pas, ni que l'utilisation de se couvrir le visage par le moyen du jilbâb est une obligation sur toute musulmane (cela constitue un autre point, sur lequel nous reviendrons plus bas).

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II.2) Lequel de ces deux passages fut révélé en premier, et lequel fut révélé ensuite ?

Il est difficile de le dire avec certitude.

Ibn Hajar écrit que le verset du jilbâb fut lui aussi révélé dans la période où le verset "min warâ'ï hijâb" fut révélé (Fat'h ul-bârî 1/328), donc (nous allons le voir) dans les temps qui suivirent le mariage du Prophète avec Zaynab.

Ce qui est certain, c'est que le mariage du Prophète avec Zaynab a eu lieu avant la calomnie contre Aïcha. En effet, car lorsque Aïcha manquera par mégarde le départ de la caravane, qu'elle sera ramenée par Safwân ibn ul-Mu'attal et que des hypocrites trouveront là l'occasion de pouvoir faire courir des rumeurs sur son sujet, Zaynab sera déjà mariée au Prophète (puisque Aïcha parlera d'elle en tant qu'épouse du Prophète : rapporté par al-Bukhârî). Un certain nombre de versets de la sourate An-Nûr seront révélés peu après, venant clarifier la situation et affirmer l'entière innocence de Aïcha. Cependant, ce qui est relaté c'est que ce furent les versets n° 11 à n° 26 qui furent alors révélés (voir Fath' ul-bârî 8/606). Il n'est donc pas certain que le verset du khimâr (qui porte le n° 31 dans ce même sourate an-Nûr) ait, lui aussi, été révélé après la calomnie contre Aïcha : il peut avoir été aussi révélé dans cette période, mais cela n'est pas dit explicitement.

Le verset du khimâr peut donc avoir été révélé après la calomnie contre Aïcha, et donc forcément après le verset de al-Ahzâb (puisque, d'une part, celui-ci a été révélé après le mariage du Prophète avec Zaynab, et que, d'autre part, Zaynab était déjà mariée au Prophète lors de l'épisode de la calomnie contre Aïcha).

Mais il peut aussi avoir été révélé bien avant la calomnie contre Aïcha, et peut-être même avant le mariage du Prophète avec Zaynab et donc avant la révélation du verset de al-Ahzâb.

Par contre, nous disposons de deux récits authentiques qui parlent chacun de ce qui s'est passé après la révélation de chacun des deux versets…

- D'un côté Umm Salama relate : "Lorsque le verset "Qu'elles rapprochent sur elles de leur jilbâb" fut révélé, les femmes ansârites sortirent avec, sur leur tête, à cause des manteaux ("kissâ"), comme des corbeaux" : "عن أم سلمة قالت: "لما نزلت: {يدنين عليهن من جلابيبهن}، خرج نساء الأنصار كأن على رءوسهن الغربان من الأكسية" (rapporté par Abû Dâoûd, n° 4101) (la comparaison porte sur la couleur noire, comme l'a écrit al-Azîmâbâdî).

- D'un autre côté Aïcha relate : "Que Dieu fasse miséricorde aux femmes émigrantes premières ! Lorsque Dieu révéla : "Et qu'elles ramènent leur khimâr sur leur encolure", elles firent plusieurs pièces de leurs manteaux, et se couvrirent avec" : " عن عائشة رضي الله عنها، قالت: "يرحم الله نساء المهاجرات الأول: لما أنزل الله: {وليضربن بخمرهن على جيوبهن}، شققن مروطهن فاختمرن بها" (rapporté par al-Bukhârî, n° 4480). "Lorsque la sourate an-Nûr fut révélée : "Et qu'elles ramènent leur khimâr sur leur encolure", les hommes de leur parenté allèrent leur réciter ce qui avait été révélé ; toutes les femmes (ansârites) prirent alors leur manteau ("mirt"), et, le matin, elles accomplirent la prière de l'aube portant foulard ("mu'tajirât"), comme s'il y avait des corbeaux sur leur tête" : "ولابن أبي حاتم من طريق عبد الله بن عثمان بن خثيم عن صفية ما يوضح ذلك ولفظه: ذكرنا عند عائشة نساء قريش وفضلهن، فقالت: "إن نساء قريش لفضلاء ولكني والله ما رأيت أفضل من نساء الأنصار أشد تصديقا بكتاب الله ولا إيمانا بالتنزيل. لقد أنزلت سورة النور {وليضربن بخمرهن على جيوبهن}، فانقلب رجالهن إليهن يتلون عليهن ما أنزل فيها، ما منهن امرأة إلا قامت إلى مرطها. فأصبحن يصلين الصبح معتجرات كأن على رؤوسهن الغربان" (Fath' ul-bârî 8/622). Ibn Hajar remarque : "ويمكن الجمع بين الروايتين بأن نساء الأنصار بادرن إلى ذلك" (Ibid.).

Par ailleurs, les hypothèses suivantes s'offrent à nous…

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II.3) Hypothèses quant à l'impératif du verset de al-Ahzâb et celui de an-Nûr :

En fonction des deux questions que nous venons de voir ("Quelle différence y a-t-il entre khimâr et jilbâb ?" et "Lequel, des deux versets du khimâr et du jilbâb, fut révélé en dernier ?") on peut présenter les hypothèses suivantes...

Hypothèse A : Soit les deux versets communiquent la même règle, et celui qui a été révélé ensuite n'est venu qu'effectuer un rappel de ce qui avait déjà été révélé ; cette hypothèse n'est envisageable que si on considère que les termes "khimâr" et "jilbâb" signifient la même chose (Possibilité 1).

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Hypothèse B : Soit chacun des deux versets est venu apporter une règle différente de celle que l'autre a apportée

--- B.1 : … et le verset du khimâr a été révélé d'abord, celui du jilbâb ensuite. Dans ce cas :
----- B.1.1 : soit le verset du khimâr demandait aux musulmanes de porter un foulard couvrant leurs cheveux et de rabattre ce foulard sur leur encolure. Puis le verset du jilbâb est venu leur dire de se couvrir le visage aussi (c'est ce que vous semblez penser) ;
----- B.1.2 : soit le verset du khimâr demandait aux musulmanes de porter un foulard couvrant leurs cheveux et de rabattre ce foulard sur leur encolure. Ensuite le verset du jilbâb leur demanda de porter un vêtement ample, enveloppant la robe et le foulard, mais ne couvrant pas le visage ;

--- B.2 : … et le verset du jilbâb a été révélé d'abord, celui du khimâr ensuite. Dans ce cas :
----- B.2.1 : soit le verset du jilbâb ordonna aux musulmanes de porter le jilbâb, cet ample vêtement couvrant le corps, mais ne leur demanda pas de se couvrir la chevelure. Ensuite le verset du khimâr est venu ordonner de porter un foulard couvrant sa chevelure ;
----- B.2.2 : soit le verset du jilbâb ordonna aux musulmanes de porter le jilbâb, cet ample vêtement couvrant le corps et la chevelure. Cependant, certaines musulmanes crurent que le port de ce vêtement était obligatoire seulement quand elles étaient à l'extérieur de chez elles, mais pas si un homme qui n'est pas leur proche parent venait chez elles à l'occasion d'une visite au mari, par exemple. Le verset du khimâr vint alors rappeler que l'obligation de couvrir ses attraits était due à la présence de tout homme ne faisant pas partie des proches parents, que l'on soit à l'extérieur ou bien chez soi (voir Le Prophète de l'islam, sa vie, son œuvre, 2/952) ;
----- B.2.3 : soit le verset du jilbâb ordonna aux musulmanes de porter le jilbâb, cet ample vêtement couvrant le corps et la chevelure. Cependant, l'encolure restait jusqu'alors découverte. Le verset du khimâr vint alors demander aux musulmanes de rabattre sur leur encolure ce qu'elles portaient déjà sur la tête.

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II.4) Analyse de ces différentes hypothèses :

L'hypothèse A ne permet pas d'expliquer à la fois le récit de Umm Salama et celui de Aïcha. En effet, chacun de ces deux récits montre qu'après la révélation de chacun des deux versets, les musulmanes ont entrepris quelque chose de nouveau. Il ne peut donc apparemment pas s'agir du même impératif répété deux fois.

Ne sont donc envisageables que les possibilités se ramifiant de l'hypothèse B

L'hypothèse B.2.1, selon laquelle le verset du jilbâb ne demandait pas aux musulmanes de se couvrir la chevelure (chose que le verset du khimâr vint demander plus tard) mais seulement de porter un vêtement ample, ne permet pas de comprendre le récit de Umm Salama, lequel montre qu'après la révélation de ce verset du jilbâb, les musulmanes portèrent un vêtement sur leur tête. Cette hypothèse est donc à délaisser elle aussi. Dès lors, le jilbâb n'est apparemment pas un vêtement ample mais ne couvrant pas la chevelure.

L'hypothèse B.1.1 exprime l'idée que le verset relatif au jilbâb a été révélé après celui du khimâr, afin de rendre obligatoire pour toute musulmane de se couvrir également le visage. Ce serait donc là ce que signifie le récit de Umm Salama.
Or, c'est l'avis disant qu'il n'y a pas eu obligation, pour l'ensemble des musulmanes, de cacher leur visage qui paraît pertinent, et ce pour plusieurs raisons :
- Pour ce qui est des termes employés dans le verset "qu'elles rapprochent sur elles de leur jilbâb", il est erroné de dire qu'ils désignent sans équivoque possible le fait de "ramener le jilbâb sur le visage", puisqu'un autre commentaire que celui-ci existe qui est relaté de Ibn Abbâs : "elle rapproche le jilbâb de son visage et ne le rabat pas" (cité et authentifié par al-Albânî dans Ar-Radd ul-muf'him, pp. 50-51). Qatâda dit quant à lui : "Dieu leur a demandé de ramener (le vêtement) près de leurs sourcils quand elles sortent" (Idem).
- Pour ce qui est maintenant de la façon dont les musulmanes ont appliqué ce verset du jilbâb, voici ce que l'on peut dire… Jâbir relate qu'un jour de fête, le Prophète, s'adressant aux musulmanes, leur demanda d'être charitables, et qu'ensuite une femme aux joues abîmées questionna le Prophète par rapport à ce qu'il avait dit (rapporté par Muslim, n° 885). Or Ibn Abbâs relate qu'après la prière d'un jour de fête, le Prophète se rendit auprès des rangées des femmes pour faire un discours ; le Prophète récita devant elles le verset de la mubâya'ah (rapporté par Muslim, n° 884, al-Bukhârî, n° 4613). An-Nawawî a écrit que ce qu'a relaté Jabîr et ce qu'a relaté Ibn Abbâs parlent du même événement (Shar'h Muslim sur 884). Ibn Hajar écrit qu'il y a un récit voisin relaté par Asmâ' bint Yazîd, et qu'il parle aussi du même événement (Fat'h ul-bârî 2/603). On peut dès lors faire le raisonnement suivant : lors du récit montrant la femme aux joues abîmées, le Prophète récita le verset de la mubâya'ah ; or ce verset a été révélé après le pacte de al-Hudaybiya (Fat'h ul-bârî 1/92), lequel a été conclu en dhu-l-qa'da de l'an 6 ; or le "voile" a été rendu obligatoire au plus tard en dhu-l-qa'da de l'an 5 (voir Fat'h ul-bârî 7/537, nous allons y revenir plus bas) ; ce récit se déroule donc quand le voile a déjà été rendu obligatoire ; or on y voit une musulmane ne rien porter sur son visage, puisque ses joues étaient visibles, et le Prophète ne lui dit rien à ce sujet. Le verset du "jilbâb" ne fait donc pas obligation à la musulmane de couvrir son visage.

L'hypothèse B.2.2 est intéressante : selon elle, le verset relatif au jilbâb a été révélé avant, pour dire aux musulmanes de se couvrir le corps sauf le visage et les mains lorsqu'elles sortent de chez elles, pour qu'elles soient reconnues comme manifestant leur pudeur. C'est ensuite que le verset du khimâr fut révélé, pour rappeler aux musulmanes de se couvrir les cheveux non pas seulement lorsqu'elles sortent de chez elles mais également en présence de tout homme n'étant pas de leur parenté, fût-il venu rendre une visite à leur mari.
Un point subsiste cependant par rapport à cette hypothèse : celle-ci ne permet pas de comprendre le récit de Aïcha, qui montre qu'apparemment, c'est à la mosquée (et non pas à la maison devant des hommes n'appartenant pas à la famille) que les femmes ansarites ont mis en application l'impératif du verset du khimâr : il ne s'agissait donc apparemment pas d'un impératif relatif à la maison.

Restent donc deux hypothèses : B.1.2 et B.2.3

Selon l'hypothèse B.1.2, c'est le verset de An-Nûr qui a été révélé avant, et celui de al-Ahzâb après. Celui de an-Nûr, révélé d'abord, était venu dire que les musulmanes devaient se couvrir la chevelure et rabattre le khimâr – un foulard – sur leur poitrine. Celui de al-Ahzâb, révélé ensuite, est venu dire qu'elles devaient désormais porter, sur leur robe et leur foulard, un jilbâb – c'est à dire un pardessus enveloppant – cela ne se mariant qu'avec la Possibilité 2, d'après laquelle le jilbâb était une sorte de grand pardessus, plus ample que le khimâr.

Et selon l'hypothèse B.2.3, c'est l'inverse : c'est le verset de al-Ahzâb qui a été révélé avant, et celui de an-Nûr après. Celui de al-Ahzâb, révélé en premier, était venu demander aux musulmanes de se couvrir la chevelure par un jilbâb. Celui de an-Nûr, révélé en second, est venu leur dire de rabattre leur khimâr sur leur encolure.
Cette hypothèse se comprendrait autant avec la Possibilité 1, selon laquelle le jilbâb est la même chose que le khimâr, qu'avec la Possibilité 2, selon laquelle le jilbâb était une sorte de grand pardessus, plus ample que le khimâr.
Cette hypothèse B.2.3 permettrait de comprendre la parole de Umm Salama comme celle de Aïcha : la parole de Umm Salama signifierait que le verset de al-Ahzâb ayant été révélé, les femmes se mirent à se couvrir la chevelure en public par un jilbâb : il s'agirait soit d'un foulard noir porté sur leur tête, soit d'un pardessus ramené de façon à couvrir la chevelure également ; ensuite, le verset de an-Nûr ayant été révélé, les femmes se mirent, comme l'a raconté Aïcha, à ramener sur leur encolure leur foulard : il s'agissait soit de la même chose qu'elles portaient déjà sur leur chevelure uniquement, soit d'un foulard qu'elles portèrent sous leur pardessus.
Cette hypothèse B.2.3 permettrait de comprendre également le récit relaté par les commentateurs quant aux circonstances de révélation du verset de an-Nûr : "Lorsque les femmes se cachaient la chevelure, elles laissaient leur foulard sans l'attacher, de sorte que leur encolure restait découverte. Dieu leur dit donc dans ce verset de rabattre leur foulard sur leur encolure" (voir par exemple Tafsîr ul-Qurtubî) (voir aussi Fat'h ul-bârî, 8/622). Voyez : ce récit semble indiquer que lorsque le verset de an-Nûr fut révélé, les musulmanes portaient déjà un vêtement sur leur tête, mais ne le rabattaient pas sur leur encolure. La révélation du verset de an-Nûr vint donc leur rappeler de le faire.

-

III) Récapitulatif de notre humble compréhension à propos de ces versets :

Si on retient (comme nous) l'hypothèse B.2.3, le verset du jilbâb a été révélé avant celui du khimâr :
--- le verset du
jilbâb vint ordonner aux musulmanes de se couvrir le corps sauf le visage et les mains ;
--- plus tard fut révélé celui du
khimâr, qui vint leur ordonner de rabattre sur leur encolure le foulard qu'elles portaient sur leur tête.

D'après Ibn Hajar, le verset du jilbâb fut révélé juste après le mariage du Prophète avec Zaynab.
D'après les recherches que nous avons vues plus haut, ce mariage eut lieu soit en l'an 3, soit en l'an 4 de l'hégire.
Ceci correspond tout à fait aux deux avis que nous avons vus par ailleurs quant à la date où l'obligation du voile a été révélée : soit en l'an 3 de l'hégire, soit en dhu-l-qa'da de l'an 4 de l'hégire.

Wallâhu A'lam
(Dieu sait mieux).

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