Lorsqu'on fait les ablutions (wudhû), il faut entre autres se laver les deux pieds jusqu'aux chevilles. Mais il est aussi autorisé de remplacer ce lavage (ghasl) des pieds par le passage (mas'h) de la main humidifiée sur la partie supérieure (et non sur le dessous) des chaussettes que l'on porte. De nombreux Compagnons – près de quatre-vingts d'après Ibn Hajar – ont rapporté cette permission du Prophète (sur lui la paix). Il y a cependant quelques règles à respecter pour pouvoir avoir recours à cette autorisation.
1) Il faut avoir enfilé ses chaussettes en étant en état de pureté rituelle :
Il faut être en état de wudhû et il faut donc que les petites ablutions que l'on a faites auparavant n'aient pas été annulées. Si ses petites ablutions (wudhû) avaient été annulées, il faut les refaire entièrement avant d'enfiler les chaussettes. A propos des chaussettes qu'il portait, le Prophète avait dit à al-Mughîra qui était en train de l'aider à faire ses petites ablutions : "Laisse-les, je les ai enfilées en état de pureté" (rapporté par al-Bukhârî et Muslim).
2) Il faut qu'il s'agisse de chaussettes qui…
2.1) Il y a des divergences d'opinions sur le fait de savoir s'il faut absolument que ces chaussettes couvrent les chevilles également (c'est l'avis de la majorité des savants) ou si cela n'est pas une condition (c'est l'avis de al-Awzâ'î).
2.2) Il y a aussi divergence d'opinions sur le fait de savoir si le passage de la main humidifiée pendant les ablutions est possible sur des chaussettes en cuir qui sont légèrement trouées ou si cela n'est pas possible : d'après ath-Thawrî, Dâoûd et Abû Thawr, cela est possible même sur des chaussettes trouées ; d'après la majorité des savants (école hanafite, mâlikite, shafi'ite), cela n'est pas possible (d'après Abû Hanîfa, la déchirure dans la chaussette doit être inférieure à la surface que couvrent trois doigts).
2.3) Concernant le matériau à partir duquel les chaussettes sont faites, il y a également des avis différents :
2.3.1) Il n'y a pas de divergences d'opinions sur le fait que cela est permis sur des chaussettes en cuir (en arabe khuff).
2.3.2) Les écoles hanafite et shafi'ite (entre autres) sont aussi d'avis que cela est permis si les chaussettes que l'on porte ne sont pas en cuir (et sont des jawrab, comme on dit en arabe) mais sont revêtues de cuir, soit entièrement (mujallad), soit seulement sur la partie qui touche le sol (muna'all).
2.3.3) Par contre, si l'on porte des chaussettes qui ne sont pas en cuir (des chaussettes appelées en arabe jawrab) qui ne sont pas du type décrit en 2.3.2, il existe des divergences d'opinions parmi les écoles juridiques :
– selon l'école malikite et selon un des avis rapportés de Abû Hanîfa : il n'est pas possible de remplacer le lavage des pieds par le passage de la main mouillée sur de telles chaussettes ;
– selon les écoles shafi'ite et hanbalite et selon l'autre avis rapporté de Abû Hanîfa : il est possible de remplacer le lavage des pieds par le passage de la main mouillée sur de telles chaussettes, mais à condition que celles-ci soient suffisamment épaisses (thakhîn). Maintenant, comment fait-on la différence entre chaussette épaisse et fine ? Il y a à ce sujet plusieurs avis juridiques : – il faut qu'on ne puisse pas voir la peau au travers de cette chaussette (selon un des avis de l'école hanafite) ; – il faut que l'eau ne traverse pas la chaussette (selon un des avis de l'école hanafite).
Selon l'école zâhirite et aussi selon Ibn Taymiyya : le mas'h est autorisé sur toute chaussette qui tient d'elle-même sur les pieds.
3) Il ne faut pas excéder la durée maximale pendant laquelle on pourra continuer à remplacer ainsi le lavage des pieds par le passage de la main humidifiée sur les chaussettes :
Si on n'est pas en voyage, cette durée maximale est de un jour (24 heures), et si on est en voyage, elle est de trois jours (72 heures). Le Prophète a dit : "Pour le voyageur trois journées et trois nuits, et pour celui qui n'est pas en voyage une journée et une nuit" (rapporté par Muslim, n° 85).
Cette durée est comptabilisée à partir du moment où :
– on a fait les ablutions et lavé ses pieds avant d'enfiler ses chaussettes (d'après al-Awzâ'î, Abû Thawr et un des avis rapportés de Ahmad) ;
– on a enfilé ses chaussettes (d'après al-Hassan al-Basrî) ;
– ses ablutions se sont annulées pour la première fois après qu'on ait enfilé ses chaussettes (d'après les écoles hanafite et shafi'ite, ainsi que l'avis retenu chez les hanbalites) ;
– on a pour la première fois passé sa main humidifiée sur ses chaussettes lorsqu'on a dû renouveler ses ablutions (d'après un autre avis de Ahmad ibn Hanbal).
Cependant, si avant que cette durée se soit écoulée on se trouve en état de grande impureté, on devra faire de grandes ablutions (prendre un bain complet, ghusl), et on devra alors enlever ses chaussettes pour laver ses pieds aussi. Safwân ibn 'Assâl rapporte : "Le Prophète nous (permettait), lorsque nous étions en voyage, de ne pas retirer nos chaussettes [pour faire les ablutions] pendant trois journées et trois nuits à cause de [l'annulation des ablutions par] le fait d'avoir été à la selle, d'avoir uriné ou d'avoir dormi, sauf en cas de grande impureté" (rapporté par at-Tirmidhî, n° 96, etc.).
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Sources :
Al-Fiqh ul-islâmi wa adillatuh, pp. 497-500 – Al-mas'h 'ala-l-jawrabayn, Muhammad Jamâl ud-dîn al-qâssimî – Fiqh us-sunna, as-Sayyid Sâbiq, tome 1 pp. 75-79 – Al-Mughnî, 1/392 etc.
Wallâhu A'lam (Dieu sait mieux).