"On ne naît pas femme mais on le devient." Ce slogan des féministes résume à lui seul le cheminement de l'émancipation des femmes en Occident. Car en Europe Occidentale, pendant le Moyen-Age et jusqu'aux temps Modernes, les droits de la femme n'étaient pas très développés. Au début du XIXè siècle est rédigée une brochure étant "projet de loi portant défense aux femmes d'apprendre à lire". Dans le même temps l'épouse est sous le contrôle absolu du mari, qui dispose du salaire. Et si l'adultère du mari est passible d'amende, celle de l'épouse lui fait encourir une peine d'emprisonnement !
C'est à partir de la fin du XVIIIè et du début du XIXème siècle que les choses commencent à bouger tout doucement. Puis, dans la deuxième moitié du XXème siècle, sous les coups de boutoir des féministes, les bastions des hommes tombent un à un en Occident, aussi bien dans le domaine social que familial.
A comparer la place de la femme dans la société et la famille occidentales hier, et les droits qu'elle a acquis aujourd'hui, qui pourrait nier le côté positif de ces multiples changements ? Pourtant, des chercheurs constatent aujourd'hui que la femme s'est certes hissée à tous les échelons, mais au prix, très souvent, d'avoir dû s'aligner sur le modèle masculin.
-
A) La perte des repères :
Certains chercheurs redoutent en effet que les femmes deviennent "des hommes comme les autres", que notre société soit en route vers un modèle androgyne, dont les vêtements et les parfums unisexes seraient les signes avant-coureurs. Il y aurait installation d'une sorte de manque de repères entre ce qui est masculin et ce qui est féminin. Elisabeth Badinter écrit : "Le changement de modèle ne remet pas seulement en cause nos comportements et nos valeurs, il touche à notre être le plus intime : notre identité, notre nature d'homme et de femme. C'est pourquoi l'inquiétude prend la forme d'une véritable angoisse existentielle qui oblige à reposer la grande question métaphysique : Qui suis-je ? Quelle est mon identité, ma spécificité d'homme ou de femme ? Comment nous distinguer l'Un de l'Autre ? Comment vivre l'Un avec l'Autre ?" (L'un est l'autre, p. 10).
"On ne naît pas femme mais on le devient." Simone de Beauvoir n'avait que partiellement raison dans cette affirmation. Elle avait raison dans le sens où parfois, une véritable humiliation est imposée à la femme par certaines sociétés et cultures. Mais elle avait tort dans la mesure où il est maintenant prouvé que la femme et l'homme connaissent, chacun de son côté, certaines spécificités dans les domaines physique, physiologique et même mental. En effet, si la femme et l'homme sont tous deux humains à part entière, de légères particularités biologiques les marquent chacun de son côté : la femme porte la "marque de fabrique" chromosomique XX, l'homme la "marque de fabrique XY". A partir de là, leur développement aux stades successifs de fœtus, d'enfant, d'adolescent et d'adulte vont suivre deux chemins à la fois proches et légèrement différents. (Voir notre page à ce sujet.) Or, l'émancipation féminine proposée par le modèle occidental est réticent à ce que l'on prenne en compte des différences entre hommes et femmes. "Quitte à bouleverser la donne naturelle", comme l'écrit Elisabeth Badinter.
-
B) D'un extrême à l'autre ?
La question que l'on est en droit de se poser est la suivante : est-ce qu'un extrême n'a pas conduit à un autre ? Est-ce que ce ne serait pas parce que l'Occident, hier, a tellement vécu la différence entre homme et femme comme une discrimination de la femme, qu'il ne veut plus, aujourd'hui, entendre parler de différences tout court ? Quitte à engendrer le manque de repères dont nous parlions plus haut ?
Elisabeth Badinter écrit : "Si la complémentarité reste le propre de l'humanité, en revanche la suprématie masculine n'est qu'une manière, parmi d'autres possibles, de vivre cette complémentarité" (L'un est l'autre, p. 13). Or, écrit-elle, "persuadés que la distinction des rôles est à la racine de l'inégalité, nous avons systématiquement, méticuleusement substitué la règle de la mixité [= la similitude des tâches et des rôles] à celle de la division sexuelle des tâches [= la répartition des tâches et des rôles selon l'identité sexuelle des humains]. Tant et si bien, qu'en même temps que disparaît de notre environnement l'image d'un monde scindé en sphères masculines et féminines (le foyer et le monde du travail ; la nursery et le bureau), nous avons l'impression de perdre nos repères les plus personnels. Il y a encore peu de temps, les certitudes ne manquaient pas. Elle donnait la vie et Il la protégeait. (...)" (L'un est l'autre, p. 11).
"Le changement de modèle ne remet pas seulement en cause nos comportements et nos valeurs, il touche à notre être le plus intime : notre identité, notre nature d'homme et de femme. C'est pourquoi l'inquiétude prend la forme d'une véritable angoisse existentielle qui oblige à reposer la grande question métaphysique : Qui suis-je ? Quelle est mon identité, ma spécificité d'homme ou de femme ? Comment nous distinguer l'Un de l'Autre ? Comment vivre l'Un avec l'Autre ?" (L'un est l'autre, p. 10).
Elle écrit aussi : "la distinction des rôles propre à ce modèle [= le modèle complémentaire] nous paraît si étroitement liée à l'inégale relation des sexes que, pour modifier celle-ci, nous mettons tout en oeuvre pour mettre fin à celle-là, quitte à bouleverser la donne "naturelle"" (L'un est l'autre, p. 13).
E. Badinter veut dire que trois modèles sont théoriquement possibles :
--- a) la complémentarité des rôles de l'homme et de la femme, avec oppression de la femme par l'homme,
--- b) la similitude des rôles,
--- c) la complémentarité réussie des rôles de l'homme et de la femme, sans oppression de la femme par l'homme.
S'il peut malheureusement arriver que la complémentarité des rôles entre femme et homme s'exprime sous la forme de l'oppression de la femme par l'homme (modèle a), cette complémentarité homme / femme peut également s'exprimer sous la forme d'une complémentarité réussie, qui tiendrait compte à la fois de l'identité humaine (commune à l'homme et à la femme), et des particularités de l'homme et de la femme (modèle c). Or, l'existence du modèle a en Occident, a donné, par réaction, progressivement naissance au modèle b. Alors que la solution réside dans le modèle c, qui constitue une troisième voie entre l'extrême que représente l'oppression masculine, et l'autre extrême qui est représenté par l'entière similitude des rôles et qui est né par opposition au premier.
Et c'est en fait cette troisième voie qu'enseignent les sources musulmanes. L'islam enseigne en effet que l'homme et la femme sont tous deux des humains à part entière et au sens complet du terme. Mais, avec leurs particularités, ils sont également et dans le même temps complémentaires. Ces particularités s'expriment dans les missions qui leur ont été confiées, et sont à préserver pour ne pas tomber dans la perte des repères… Pour plus de détails, lire mon article : La complémentarité homme / femme en islam.
Wallâhu A'lam (Dieu sait mieux).